☢️ Accidents nucléaires : ruptures historiques et cicatrices environnementales

🎯 Pourquoi l’histoire des accidents nucléaires est-elle cruciale ?

L’histoire du XXe siècle est profondément marquée par la maîtrise de l’atome, une promesse de progrès énergétique infini qui s’est parfois transformée en cauchemar technologique. Les accidents nucléaires ne sont pas de simples faits divers industriels ; ils représentent des ruptures majeures qui ont redéfini notre rapport à la nature, à la science et au risque global. De la catastrophe de Tchernobyl en 1986 au drame de Fukushima en 2011, ces événements ont agi comme des révélateurs des fragilités de nos sociétés modernes face à des technologies qu’elles ont créées mais peinent parfois à contrôler totalement.

👉 Plongeons ensemble dans cette histoire complexe pour comprendre comment ces crises ont façonné le monde contemporain.

🗂️ Dans cet article, tu vas découvrir :

👉 Poursuivons avec le premier chapitre pour bien comprendre le contexte de ce thème.

🧪 La genèse du risque : des promesses aux premières alertes

📌 L’atome : entre promesse d’abondance et danger invisible

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le monde entre dans l’ère atomique avec un mélange de fascination et de terreur, marqué par les bombardements d’Hiroshima et Nagasaki. Cependant, très vite, le discours officiel, notamment le programme américain « Atoms for Peace » lancé en 1953 par le président Eisenhower, tente de dissocier l’usage militaire de l’usage civil. L’énergie nucléaire est alors présentée comme une source d’électricité inépuisable, propre et bon marché, capable de soutenir la croissance économique des Trente Glorieuses et de moderniser les sociétés industrielles. Les ingénieurs et les scientifiques jouissent alors d’un prestige immense, et la technologie nucléaire devient un symbole de puissance nationale, particulièrement pour les États-Unis, l’URSS, la France et le Royaume-Uni.

Pourtant, cette marche forcée vers le progrès technologique masque des risques inhérents à la manipulation de la matière radioactive. Durant les années 1950 et 1960, la culture du secret, inhérente à la Guerre froide, empêche toute transparence sur les incidents qui émaillent le développement des premiers réacteurs. Les populations sont tenues dans l’ignorance des dangers potentiels, et les normes de sécurité sont souvent sacrifiées sur l’autel de la rapidité de développement ou de la production de plutonium à des fins militaires. C’est dans ce contexte de compétition géopolitique et de foi aveugle en la technique que surviennent les premiers accidents nucléaires, souvent minimisés ou totalement cachés.

Il est fondamental de comprendre que la perception du risque n’était pas la même qu’aujourd’hui. À cette époque, la préoccupation environnementale est embryonnaire, bien que l’on commence à voir apparaître les premières critiques structurelles, comme nous l’avons vu dans le dossier sur les révoltes contre l’industrialisation. Le nucléaire civil se développe donc sans véritable contre-pouvoir citoyen initialement, dans une logique technocratique descendante où l’État et les experts détiennent le monopole de la décision et de l’information.

📌 Les catastrophes oubliées des années 1950 : Kyshtym et Windscale

Bien avant Tchernobyl, des accidents majeurs ont eu lieu, mais leur impact médiatique a été étouffé. L’un des plus graves est la catastrophe de Kyshtym, survenue le 29 septembre 1957 en URSS, dans le complexe nucléaire de Maïak. Une panne du système de refroidissement d’une cuve de déchets radioactifs provoque une explosion chimique non nucléaire, mais qui projette un nuage radioactif contaminant une zone de plus de 20 000 km². Cet événement, classé niveau 6 sur l’échelle INES (l’échelle internationale des événements nucléaires), reste secret pendant des décennies. Les autorités soviétiques évacuent discrètement plus de 10 000 personnes sans expliquer la raison réelle, et la région reste aujourd’hui l’une des plus polluées au monde.

La même année, en octobre 1957, le Royaume-Uni connaît l’incendie de Windscale. Ce réacteur, utilisé pour produire du plutonium militaire, prend feu, relâchant de l’iode-131 radioactif dans l’atmosphère. Pour éviter la panique et ne pas compromettre les relations avec les États-Unis, le gouvernement britannique minimise l’incident, bien que du lait contaminé soit détruit dans les environs. Ces événements démontrent que dès les débuts, le risque d’accidents nucléaires est une réalité tangible, mais la gestion politique prime sur la sécurité sanitaire et environnementale. Ces précédents historiques sont essentiels pour comprendre la méfiance qui s’installera plus tard.

Ces accidents précurseurs illustrent également la difficulté de gérer les déchets et les sous-produits de la fission, une problématique qui reste centrale aujourd’hui. À Kyshtym, c’est le stockage des déchets liquides qui a failli, montrant que le danger ne réside pas uniquement dans le cœur du réacteur, mais dans l’ensemble du cycle du combustible. La nature invisible de la contamination radioactive rend ces catastrophes particulièrement anxiogènes une fois révélées, car elles touchent l’air, l’eau et les sols sur des durées géologiques, dépassant l’échelle de temps humaine.

📌 Three Mile Island : le réveil de l’opinion publique occidentale

Le tournant s’opère aux États-Unis le 28 mars 1979 avec l’accident de la centrale de Three Mile Island en Pennsylvanie. Suite à une défaillance technique couplée à une erreur humaine, le cœur du réacteur n°2 entre en fusion partielle. Contrairement aux accidents soviétiques, celui-ci se déroule sous l’œil des caméras du monde entier, dans une démocratie où la presse est libre. L’événement provoque une panique immense, entraînant l’évacuation volontaire de 140 000 personnes, notamment des femmes enceintes et des enfants. Bien que les rejets radioactifs aient été limités grâce à l’enceinte de confinement, l’image de l’industrie nucléaire est durablement ternie.

Le choc est d’autant plus fort que le film Le Syndrome chinois, qui décrit un scénario similaire, est sorti sur les écrans seulement douze jours avant l’accident, créant une résonance culturelle inédite. Cet événement marque un coup d’arrêt brutal à la construction de nouvelles centrales aux États-Unis et alimente la naissance de l’écologie politique structurée. Les mouvements antinucléaires gagnent en légitimité, arguant que la technologie est trop complexe pour être totalement maîtrisée par l’homme. La sûreté nucléaire devient alors un enjeu public majeur, forçant l’industrie à revoir ses protocoles de sécurité et de formation.

🌪️ Tchernobyl : l’accident qui a changé le monde

📌 La nuit du 26 avril 1986 : anatomie d’un désastre

L’accident de la centrale V.I. Lénine de Tchernobyl, en actuelle Ukraine (alors en URSS), constitue le point de bascule historique des accidents nucléaires. Dans la nuit du 26 avril 1986, lors d’un test de sûreté mal préparé et exécuté en violation des protocoles, le réacteur n°4 s’emballe. La puissance augmente de manière incontrôlée, provoquant deux explosions successives qui détruisent le bâtiment du réacteur et exposent le cœur en fusion à l’air libre. Un incendie de graphite se déclare, propulsant pendant dix jours des éléments radioactifs (iode, césium, strontium) dans la haute atmosphère, contaminant une grande partie de l’Europe.

La gestion immédiate de la crise est catastrophique. Les autorités locales tentent de cacher l’ampleur du désastre à Moscou, et Moscou tente de le cacher au monde. Il faut attendre que la Suède détecte une hausse anormale de la radioactivité sur son sol pour que l’URSS admette l’accident. Sur place, les pompiers de Pripyat interviennent sans protection adéquate contre les radiations, sacrifiant leur vie pour éteindre les incendies conventionnels. Ils sont les premières victimes de ce que l’on appellera le « syndrome d’irradiation aiguë ». L’évacuation de la ville voisine de Pripyat (50 000 habitants) n’est ordonnée que 36 heures après l’explosion, exposant la population à des doses massives de radiations.

Cet événement révèle au monde la déliquescence du système soviétique, incapable de garantir la sécurité de ses installations et privilégiant le secret d’État à la santé publique. Mikhaïl Gorbatchev dira plus tard que Tchernobyl a été peut-être la véritable cause de l’effondrement de l’URSS. L’accident force le régime à plus de transparence, accélérant la politique de la Glasnost. D’un point de vue technique, il met en évidence les défauts de conception des réacteurs RBMK, dépourvus d’enceinte de confinement robuste, contrairement aux standards occidentaux de l’époque.

📌 Les « liquidateurs » et la bataille du sarcophage

Pour maîtriser le réacteur et empêcher une seconde explosion encore plus dévastatrice, l’Union soviétique mobilise des moyens humains et matériels colossaux. Environ 600 000 hommes, appelés les « liquidateurs », sont envoyés sur le site entre 1986 et 1990. Il s’agit de pompiers, de militaires, de mineurs et d’ouvriers venus de toutes les républiques de l’URSS. Leurs tâches sont dantesques : éteindre l’incendie, déblayer les débris hautement radioactifs sur le toit du réacteur (parfois à la pelle, pour des durées de moins d’une minute), construire un barrage pour protéger les nappes phréatiques et enfin, édifier un « sarcophage » de béton et d’acier pour confiner les ruines du réacteur.

Le bilan humain parmi les liquidateurs reste un sujet de controverse intense. Si les rapports officiels de l’ONU reconnaissent quelques milliers de morts liés aux conséquences directes, les associations et certaines études indépendantes évoquent des dizaines de milliers de décès prématurés et de maladies invalidantes. Ces hommes ont reçu des doses cumulées importantes, souvent mal comptabilisées. Leur sacrifice a permis d’éviter que la contamination ne soit encore plus étendue, sauvant littéralement l’Europe d’une catastrophe écologique irréversible. Pour approfondir le devoir de mémoire, on peut consulter les archives disponibles via des institutions comme l’ONU qui gèrent le suivi des zones affectées.

📌 Le nuage radioactif et ses frontières : une crise de confiance européenne

La propagation du nuage radioactif de Tchernobyl illustre la nature transfrontalière des accidents nucléaires. Poussés par les vents, les radionucléides se déposent sur l’Ukraine, la Biélorussie (qui reçoit 70% des retombées les plus lourdes), la Russie, puis la Scandinavie et l’Europe de l’Ouest. En France, une polémique éclate : les autorités communiquent de manière rassurante, laissant entendre que l’anticyclone des Açores a protégé le territoire. Cette communication maladroite, interprétée comme le fameux mensonge du « nuage qui s’arrête à la frontière », provoque une crise de confiance durable envers les experts officiels et l’État, renforçant les mouvements écologistes locaux comme ceux décrits dans l’article sur l’écologie en France.

Les conséquences sanitaires, notamment l’augmentation des cancers de la thyroïde chez les enfants dans les zones les plus touchées, sont avérées. Tchernobyl impose une nouvelle réalité : celle des territoires condamnés. La « zone d’exclusion » de 30 km autour de la centrale devient un no man’s land humain, où la nature reprend ses droits de manière étrange et désordonnée. Cet accident marque la prise de conscience que l’énergie nucléaire porte en elle un risque systémique capable de rendre des régions entières inhabitables pour des siècles, influençant profondément les débats lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992.

🌊 Fukushima : la crise du nucléaire au XXIe siècle

📌 La triple catastrophe du 11 mars 2011

Vingt-cinq ans après Tchernobyl, alors que l’industrie nucléaire parlait d’une « renaissance » et que la sûreté semblait maîtrisée, survient l’accident de Fukushima Daiichi au Japon. Le 11 mars 2011, un séisme de magnitude 9,1 – l’un des plus violents jamais enregistrés – frappe la côte nord-est de l’archipel. Les réacteurs de la centrale s’arrêtent automatiquement comme prévu. Cependant, le séisme est suivi d’un tsunami dévastateur, avec une vague dépassant les 14 mètres, qui submerge les digues de protection et noie les générateurs de secours diesel situés en sous-sol. Privée d’électricité, la centrale ne peut plus refroidir ses cœurs.

S’ensuit une course contre la montre perdue d’avance. Dans les jours qui suivent, les cœurs des réacteurs 1, 2 et 3 entrent en fusion. L’hydrogène généré par la réaction chimique entre l’eau et le combustible surchauffé provoque des explosions spectaculaires qui détruisent les bâtiments des réacteurs. Contrairement à Tchernobyl, il n’y a pas d’incendie de graphite à ciel ouvert, mais les rejets radioactifs sont massifs, contaminant l’air et surtout l’océan Pacifique, où des milliers de tonnes d’eau contaminée sont déversées pour refroidir les installations en urgence. C’est le premier accident nucléaire majeur survenant dans un pays ultra-technologique et préparé aux catastrophes naturelles, brisant le mythe de la sécurité absolue.

La gestion de la crise par l’opérateur TEPCO et le gouvernement japonais est critiquée pour ses lenteurs et son manque de transparence initial. Plus de 150 000 personnes sont évacuées dans un rayon de 20 km et au-delà, dans des conditions souvent chaotiques. Le traumatisme est immense pour la société japonaise, pourtant historiquement liée à l’atome par le souvenir d’Hiroshima. Cet événement relance instantanément le débat mondial sur l’énergie, conduisant certains pays comme l’Allemagne à décider leur sortie définitive du nucléaire.

📌 Les spécificités : pollution marine et gestion de l’eau

L’accident de Fukushima se distingue par sa dimension maritime. La centrale étant située en bord de mer, la contamination de l’environnement marin est sans précédent. Les isotopes radioactifs, notamment le césium-137, intègrent la chaîne alimentaire marine, posant des questions complexes sur la pêche et la sécurité alimentaire dans le Pacifique. De plus, le problème majeur post-accident devient la gestion de l’eau : pour maintenir les cœurs fondus (le corium) à basse température, il faut injecter de l’eau en permanence. Cette eau se charge en radioactivité et doit être stockée dans des milliers de citernes qui envahissent le site de la centrale.

Cette problématique de l’eau contaminée perdure des années après la catastrophe. En 2023, le Japon commence le rejet progressif de cette eau traitée (débarrassée de la plupart des radionucléides sauf le tritium) dans l’océan, une décision validée par l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA) mais vivement contestée par les pays voisins et les associations écologistes. Cela souligne que la fin d’un accident nucléaire ne se décrète pas : la gestion des conséquences s’étale sur des décennies. Pour comprendre les enjeux de la coopération internationale sur ces sujets, on peut se référer aux mécanismes des COP et accords internationaux qui traitent aussi, indirectement, des pollutions transfrontalières.

🍃 L’impact écologique durable : zones mortes et résilience

📌 La contamination des écosystèmes : un héritage invisible

Les accidents nucléaires laissent une empreinte écologique unique. Contrairement à une marée noire ou à une pollution chimique visible, la radioactivité est insidieuse. Elle pénètre les sols, est absorbée par les racines des plantes, puis passe aux herbivores et aux carnivores par le processus de bioaccumulation. Le Césium-137, avec sa demi-vie de 30 ans, reste le principal contaminant à long terme. Dans les forêts autour de Tchernobyl ou de Fukushima, les champignons, les baies et le gibier (sangliers, cerfs) présentent encore aujourd’hui des taux de radioactivité supérieurs aux normes.

Les effets sur la faune et la flore sont complexes et font l’objet d’études scientifiques continues. Dans les zones les plus touchées, comme la « Forêt Rouge » près de Tchernobyl (où les pins sont morts sur pied et ont roussi sous l’effet des radiations intenses), on a observé des anomalies de développement, une baisse de la fertilité chez certaines espèces d’oiseaux et d’insectes, et une réduction de la biodiversité des micro-organismes du sol, ce qui ralentit la décomposition de la litière végétale. Ces écosystèmes perturbés deviennent des laboratoires à ciel ouvert pour la radioécologie, une science qui étudie le comportement des polluants nucléaires dans l’environnement.

📌 Le paradoxe des zones d’exclusion : des réserves naturelles involontaires ?

Il existe un phénomène paradoxal et fascinant : les zones d’exclusion, vidées de toute présence humaine, sont devenues de véritables refuges pour la vie sauvage. En l’absence d’agriculture, de chasse, de circulation routière et d’industrie, la nature reprend ses droits de manière spectaculaire. Autour de Tchernobyl, on observe des populations florissantes de loups, d’ours bruns, de lynx, de chevaux de Przewalski (réintroduits) et d’élans. La zone est devenue l’une des plus grandes réserves de biodiversité d’Europe. Cela ne signifie pas que la radioactivité est sans danger, mais que la pression des activités humaines ordinaires est souvent plus destructrice pour la faune que les radiations chroniques.

Ce constat interroge notre rapport à la nature : faut-il une catastrophe nucléaire pour que nous laissions de l’espace au sauvage ? Cependant, les scientifiques restent prudents. Si les populations animales semblent prospères, les effets génétiques à long terme sur les générations successives restent à surveiller. De plus, ces zones restent extrêmement dangereuses : les incendies de forêt, fréquents en été avec le réchauffement climatique, risquent de remettre en suspension les particules radioactives fixées dans la végétation, créant une pollution secondaire. Pour approfondir ces dynamiques environnementales, les ressources de l’Lumni proposent des dossiers pédagogiques excellents sur l’impact de l’homme sur la biodiversité.

📢 La dimension politique : mobilisation citoyenne et transparence

📌 La contestation antinucléaire et l’essor de la société civile

Les accidents nucléaires ont historiquement servi de catalyseurs aux mouvements sociaux. Si la contestation existait avant (notamment contre le nucléaire militaire), Three Mile Island et surtout Tchernobyl ont élargi la base militante. En France, l’épisode de Plogoff (1978-1981), où la population bretonne s’est opposée avec succès à la construction d’une centrale, est emblématique de cette résistance citoyenne. L’argumentaire ne porte plus seulement sur le refus du « progrès », mais sur la défense du territoire, la santé des enfants et le droit à décider de son avenir énergétique.

En Allemagne, le mouvement antinucléaire est particulièrement puissant et structuré dès les années 1970. Il est à l’origine de la création du parti Die Grünen (Les Verts), qui deviendra une force politique majeure. La catastrophe de Fukushima en 2011 a validé leur combat historique, aboutissant à la décision de la chancelière Angela Merkel de fermer toutes les centrales allemandes. On voit ici comment un événement technique à l’autre bout du monde peut transformer le paysage politique d’une nation. Le nucléaire devient un sujet de clivage politique central, obligeant les gouvernements à justifier leurs choix énergétiques non plus seulement par l’économie, mais par l’éthique et la sécurité.

📌 L’exigence de transparence et la surveillance internationale

L’héritage politique majeur des accidents est la fin du secret absolu. Après Tchernobyl, la communauté internationale a compris que la radioactivité ne connaît pas de frontières. L’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA), basée à Vienne, a vu son rôle renforcé, bien qu’elle soit parfois critiquée pour sa double mission de promouvoir le nucléaire tout en le contrôlant. Des conventions internationales ont été signées pour obliger les États à signaler immédiatement tout incident. La création de l’échelle INES (de 0 à 7) vise à rendre compréhensible la gravité des événements pour le grand public.

En France, cette exigence a conduit à la création d’autorités administratives indépendantes, comme l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) et l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN), dont les rapports sont publics. Cette transparence est une réponse directe à la crise de confiance post-Tchernobyl. Aujourd’hui, chaque incident, même mineur, est répertorié. Cette vigilance citoyenne et institutionnelle est un acquis démocratique fondamental, prouvant que la technique ne peut s’abstraire du contrôle démocratique.

🔮 Les défis contemporains : vieillissement et gestion des déchets

📌 Le parc nucléaire mondial face au temps et au climat

Aujourd’hui, la question des accidents nucléaires se pose dans des termes nouveaux. Le parc mondial de réacteurs est vieillissant. De nombreuses centrales construites dans les années 1970 ou 1980 arrivent en fin de vie théorique, et leur prolongation (jusqu’à 50, 60 voire 80 ans) soulève des questions de sûreté inédites : comment vieillissent les cuves en acier soumises à une irradiation constante ? Les câblages résisteront-ils ? Le risque n’est plus seulement l’erreur humaine ou le défaut de conception initial, mais l’usure des matériaux.

De plus, le changement climatique introduit une nouvelle variable de risque. Les sécheresses et les canicules affectent le débit et la température des fleuves utilisés pour refroidir les réacteurs, obligeant parfois à des arrêts de production ou à des dérogations environnementales pour rejeter de l’eau plus chaude, ce qui nuit à la faune aquatique. La montée du niveau de la mer menace les centrales côtières (comme celle du Blayais en France, qui avait frôlé l’inondation lors de la tempête de 1999). L’adaptation des installations nucléaires aux événements climatiques extrêmes est le grand défi de sécurité du XXIe siècle.

📌 La question irrésolue des déchets et le risque géopolitique

Enfin, la notion d’accident ne se limite pas au réacteur. La gestion des déchets radioactifs à haute activité et à vie longue (plusieurs centaines de milliers d’années) constitue un risque temporel vertigineux. Les projets d’enfouissement profond, comme Cigéo à Bure en France, visent à soustraire ces matières dangereuses aux aléas de la surface. Cependant, ils suscitent des oppositions fortes et posent la question de la mémoire : comment signaler le danger aux générations futures dans 10 000 ans ? Un accident lors du transport ou du stockage de ces déchets reste un scénario redouté.

L’actualité récente, avec la guerre en Ukraine et l’occupation de la centrale de Zaporijia (la plus grande d’Europe), a également réveillé le spectre d’un accident nucléaire causé par un conflit armé. C’est une situation inédite dans l’histoire : une centrale nucléaire prise en otage dans une zone de guerre, transformant une infrastructure civile en cible ou en bouclier. Cela rappelle que la sûreté nucléaire dépend d’un contexte de paix et de stabilité institutionnelle, conditions qui ne sont jamais garanties éternellement.

🧠 À retenir sur les accidents nucléaires

  • Les accidents de Three Mile Island (1979), Tchernobyl (1986) et Fukushima (2011) sont les trois ruptures historiques majeures.
  • Ils ont transformé la perception du risque, passant d’une confiance technologique aveugle à une exigence de transparence et de sûreté.
  • L’impact écologique est durable : contamination des sols (Césium-137), pollution marine et création de zones d’exclusion paradoxalement riches en biodiversité.
  • Ces crises ont favorisé la naissance de l’écologie politique et renforcé la société civile face aux choix industriels des États.

❓ FAQ : Questions fréquentes sur les accidents nucléaires

🧩 Quelle est la différence entre un accident niveau 5 et niveau 7 ?

L’échelle INES classe les événements de 0 à 7. Le niveau 5 (comme Three Mile Island) correspond à un accident avec des conséquences étendues mais limitées géographiquement. Le niveau 7 (Tchernobyl et Fukushima) désigne un « accident majeur » avec des rejets massifs de radioactivité ayant un impact sanitaire et environnemental étendu sur plusieurs pays.

🧩 Peut-on habiter à nouveau dans la zone de Tchernobyl ?

Officiellement, non. La zone d’exclusion de 30 km reste interdite à l’habitation permanente en raison de la contamination des sols (points chauds). Cependant, quelques personnes âgées (les « samosely ») sont retournées y vivre illégalement, et des travailleurs y effectuent des rotations courtes pour le démantèlement.

🧩 Le nucléaire est-il dangereux pour le climat ?

Non, en termes d’émissions de CO2, le nucléaire est une énergie très « décarbonée », comparable à l’éolien. C’est son atout majeur. Le danger réside dans le risque d’accident radioactif et la gestion des déchets, pas dans l’effet de serre. C’est tout le cœur du débat actuel sur la transition énergétique.

🧩 Quiz – Maîtriser l’histoire des accidents nucléaires

1. En quelle année a eu lieu l’accident de Tchernobyl ?



2. Quel accident a eu lieu aux États-Unis en 1979 ?



3. Quelle catastrophe naturelle a déclenché l’accident de Fukushima ?



4. Comment appelle-t-on les ouvriers qui sont intervenus à Tchernobyl ?



5. Quel élément chimique radioactif a une demi-vie d’environ 30 ans et pollue les sols durablement ?



6. Quelle échelle internationale mesure la gravité des événements nucléaires ?



7. Quel pays a décidé de sortir du nucléaire suite à Fukushima ?



8. Où a eu lieu l’accident secret de 1957 en URSS ?



9. Quelle zone autour de Tchernobyl est interdite ?



10. Quel est le nom du projet français d’enfouissement des déchets à Bure ?



11. Quel président américain a lancé le programme « Atoms for Peace » ?



12. Quel film sorti en 1979 a coïncidé avec l’accident de Three Mile Island ?



13. Quelle ville a été évacuée 36h après l’explosion de Tchernobyl ?



14. Quel phénomène inattendu observe-t-on dans la zone d’exclusion de Tchernobyl ?



15. Quel est le niveau de gravité des accidents de Tchernobyl et Fukushima ?



16. Quel organe de l’ONU surveille le nucléaire civil ?



17. Quel mouvement citoyen français s’est opposé à une centrale en Bretagne (1978-1981) ?



18. Quelle est la particularité des réacteurs de Fukushima par rapport à Tchernobyl ?



19. Qu’est-ce que le corium ?



20. Quelle politique de Gorbatchev a été accélérée par Tchernobyl ?



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