🏛️ Place du président sous la Ve République : pouvoirs, limites et évolutions

🎯 Pourquoi la « place du président » est-elle centrale depuis 1958 ?

Depuis 1958, la place du président structure la vie politique française : arbitre au-dessus des partis selon l’article 5, mais aussi chef d’orchestre de l’exécutif dans bien des périodes. Parce que la Ve République naît d’une crise institutionnelle, elle confie au chef de l’État des leviers décisifs qui ont évolué avec la pratique, des référendums gaulliens au quinquennat. Ainsi, comprendre cette place du président, c’est éclairer les pouvoirs, les limites et les usages qui ont façonné notre histoire contemporaine. Pour situer le cadre, relis la Constitution de 1958 et le rôle fondateur de Charles de Gaulle, puis compare avec les tournants de Mai 68 et des réformes.

🗂️ Dans cet article, tu vas découvrir :

👉 Poursuivons avec le chapitre suivant — Genèse 1958 et architecture du régime.

🧭 Genèse 1958 et architecture du régime

Pour comprendre la place du président sous la Ve République, il faut repartir de 1958. La IVe agonise dans l’instabilité ministérielle, et la crise algérienne révèle les limites d’un Parlement tout-puissant. Dès lors, l’idée s’impose d’un exécutif solide, doté d’un chef de l’État capable d’arbitrer et de durer. Ainsi, la Constitution du 4 octobre 1958 invente un équilibre inédit en France, ni pur parlementarisme, ni présidentialisme intégral, mais un régime « mixte » qui rehausse la figure présidentielle.

📜 Pourquoi la place du président change en 1958 ?

La IVe République a connu vingt-quatre gouvernements en douze ans. Par conséquent, la responsabilité politique se dilue et l’action devient difficile. En 1958, Michel Debré et le général de Gaulle conçoivent une architecture qui confie au président un rôle d’arbitre et de garant des institutions, selon l’article 5. De plus, ils l’installent au sommet de l’exécutif, aux côtés d’un Premier ministre responsable devant l’Assemblée. Dès l’origine, la place du président est donc pensée comme un pivot, entre légitimité nationale et stabilité gouvernementale.

🏗️ Les grands choix d’architecture institutionnelle

Premier choix, la séparation des fonctions est clarifiée. Le président nomme le Premier ministre et, sur proposition de ce dernier, les ministres, comme l’indique l’article 8. Deuxième choix, le président reçoit des outils d’appel au peuple, notamment le référendum législatif de l’article 11. Troisième choix, la dissolution de l’Assemblée nationale par l’article 12. Enfin, en cas de crise extrême, l’article 16 concentre provisoirement les pouvoirs pour assurer la continuité de l’État. Par ces quatre leviers, la place du président devient opérationnelle, au-delà du seul symbolique.

🗳️ De la désignation à la légitimation : 1962, un tournant

Au départ, le chef de l’État est élu par un collège élargi. Toutefois, en 1962, le choix du suffrage universel direct bouleverse la donne. Désormais, la légitimité populaire du président dépasse celle de toute autre institution. Par ricochet, la place du président s’en trouve renforcée, car il peut s’appuyer sur un mandat direct pour impulser une orientation politique. Pour replacer cette évolution dans son contexte, consulte l’article satellite Constitution de 1958 ainsi que la page Charles de Gaulle, qui détaille la logique gaullienne du recours au peuple.

⚖️ Un équilibre pensé contre les dérives du passé

Le constituant de 1958 veut éviter l’impuissance gouvernementale. Par conséquent, il réduit l’initiative parlementaire et renforce l’ordre du jour gouvernemental, ce qui facilite l’action de l’exécutif. En parallèle, le Conseil constitutionnel devient un acteur du contrôle des lois. Ainsi, la place du président s’inscrit dans un triangle institutionnel : un Parlement encadré, un gouvernement responsable, et un chef de l’État garant du fonctionnement régulier des pouvoirs publics. Cet équilibre méritera d’être relu à l’aune des cohabitations et du quinquennat.

🧭 Arbitre, chef des armées et diplomatie : un rôle « au-dessus » mais engagé

L’article 5 présente le président comme l’arbitre. Néanmoins, l’article 15 le consacre chef des armées et la pratique lui confie l’impulsion diplomatique. Dès lors, la place du président se manifeste fortement dans la défense et les affaires étrangères, où la voix de la France s’incarne souvent à l’Élysée. Cette articulation arbitre-acteur est au cœur de la « monarchie républicaine » décrite par certains observateurs, et elle sera réinterprétée par chaque titulaire de la fonction.

🧩 Les « pouvoirs propres » et la pratique gaullienne

Certains actes du président ne nécessitent pas de contreseing ministériel, comme la dissolution de l’Assemblée ou le recours à l’article 16. En conséquence, ces « pouvoirs propres » donnent au chef de l’État une marge d’initiative décisive. Toutefois, la pratique gaullienne, avec l’usage du référendum comme plébiscite de politique générale, accentue encore la place du président. Cette lecture, très personnelle, sera ensuite discutée, notamment après Mai 68, puis contrainte par les cohabitations.

🔗 Une place redéfinie par la dynamique partisane

La Constitution ne vit pas seule ; elle s’anime avec les partis, les majorités et les élections. Quand le président dispose d’une majorité à l’Assemblée, il impulse et coordonne. En cas de majorité hostile, la cohabitation redéfinit la place du président vers la diplomatie et la défense, tandis que Matignon mène la politique intérieure. Pour mesurer ces bascules, tu pourras croiser cet article avec Présidents marquants, qui illustre les styles de présidence et leurs effets.

🧭 Un régime « à géométrie variable »

Parce que les outils sont puissants mais encadrés, la Ve République autorise des styles différents. Ainsi, la place du président apparaît tantôt ascendante, tantôt contenue, selon l’alignement des calendriers, des majorités et des crises. Plus tard, le quinquennat et l’inversion du calendrier électoral tendront à présidentialiser davantage encore l’exécutif. Nous verrons comment ces choix techniques ont eu des effets politiques majeurs sur la durée et l’intensité de la conduite présidentielle.

👉 On continue avec le chapitre suivant — ⚙️ Pouvoirs constitutionnels du président (#pouvoirs-constitutionnels).

⚙️ Pouvoirs constitutionnels du président

Pour saisir la place du président dans la Ve République, il faut revenir au texte même : la Constitution. Elle dessine un chef de l’État « arbitre » (art. 5) mais doté de leviers concrets : nomination du Premier ministre, présidence du Conseil des ministres, référendum, dissolution, défense, diplomatie, pouvoirs exceptionnels. Ainsi, la fonction combine symbolique et efficacité, surtout quand l’Assemblée lui est favorable. Pour les bases, revois l’article satellite Constitution de 1958.

📜 Article 5 : l’arbitre et le garant

L’article 5 place le président au-dessus de la mêlée : il veille au respect de la Constitution, au fonctionnement régulier des pouvoirs publics et à la continuité de l’État. De plus, il garantit l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire. Concrètement, cette clause de garantie fonde une légitimité d’intervention dans les crises, mais aussi un devoir de retenue lorsque le gouvernement et la majorité parlementaire conduisent la politique de la Nation.

🧑‍⚖️ Nommer et encadrer l’exécutif (art. 8, 9, 13)

Aux termes de l’article 8, le président nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions sur présentation de la démission du gouvernement ; il nomme les ministres sur proposition du Premier ministre. Avec l’article 9, il préside le Conseil des ministres, où sont délibérés projets de loi, ordonnances et décrets majeurs. Enfin, l’article 13 lui confère un pouvoir de nomination aux emplois civils et militaires les plus élevés, ce qui structure la haute administration et l’État régalien. Dès lors, la place du président s’exprime au cœur de l’exécutif, même si la responsabilité politique du gouvernement devant l’Assemblée demeure.

📝 Le président et la loi (art. 10 et 11)

L’article 10 lui confie la promulgation des lois et la faculté de demander une nouvelle délibération au Parlement. L’article 11 autorise le recours au référendum sur certains sujets (organisation des pouvoirs, réformes économiques, sociales ou environnementales, etc.) et, depuis 2008, le référendum d’initiative partagée (RIP) encadré par des seuils de parlementaires et d’électeurs. Historiquement, l’usage du référendum a renforcé la place du président lorsqu’il en fait un instrument d’orientation politique.

🏛️ Dissoudre pour dénouer une crise (art. 12)

L’article 12 permet au président de dissoudre l’Assemblée nationale après consultation de certaines autorités. Cet outil peut déverrouiller un conflit politique ou rechercher une nouvelle majorité. Toutefois, il est contraint par des délais (pas de dissolution dans l’année qui suit une précédente), et son usage comporte un risque politique majeur : l’électorat peut sanctionner l’initiative présidentielle.

🛡️ Défense et diplomatie (art. 14, 15, 52)

Chef des armées à l’article 15, le président incarne l’autorité politique de la défense, en lien étroit avec le Premier ministre responsable de la conduite de la politique de la Nation. À l’article 14, il accrédite les ambassadeurs ; à l’article 52, il négocie et ratifie les traités (sous réserve, pour certains, d’une autorisation parlementaire). Par conséquent, la place du président est particulièrement saillante à l’international, où s’articulent représentation, sécurité et engagements.

🚨 Pouvoirs exceptionnels (art. 16)

En cas de menace grave et immédiate sur les institutions ou la Nation, l’article 16 permet au président de prendre des mesures exigées par les circonstances, après consultations obligatoires. Ce régime, très encadré depuis 2008, demeure exceptionnel et controversé : il concentre provisoirement les pouvoirs pour assurer la continuité de l’État. Il illustre, par son existence même, la fonction de « garant suprême » attachée à la place du président.

🏛️ Conseil constitutionnel et contreseing (art. 54, 56, 61)

Le président nomme trois membres du Conseil constitutionnel et en désigne le président (art. 56). Il peut saisir le Conseil (art. 61) pour contrôler la constitutionnalité des lois, et demander un contrôle avant ratification d’un traité (art. 54). Par ailleurs, la règle du contreseing signifie que la plupart des actes présidentiels doivent être signés aussi par le Premier ministre et, le cas échéant, par les ministres concernés. Cependant, certains pouvoirs propres échappent au contreseing (notamment art. 8 al. 1, 11, 12, 16, 18, 54, 56, 61), ce qui renforce l’autonomie décisionnelle du chef de l’État.

🔗 Texte et pratique : une puissance à « géométrie variable »

Le texte confère des outils robustes, mais la pratique en module la portée. Avec une majorité parlementaire, l’influence présidentielle s’étend à l’ensemble de l’agenda. En revanche, en cohabitation, la place du président se recentre sur les attributions régaliennes et internationales. Ainsi, les chapitres suivants — cohabitations et quinquennat — montrent comment règles et calendriers redessinent concrètement la fonction.

👉 Poursuivons avec le chapitre suivant — 🏛️ Pratiques gaulliennes et présidence « arbitre-acteur » (#pratiques-gaulliennes). Pour un panorama des titulaires, vois aussi Présidents marquants et, pour le contexte social, Mai 68 et réformes. Pour approfondir le texte, tu peux consulter la Constitution sur Légifrance et les analyses du Conseil constitutionnel.

🏛️ Pratiques gaulliennes et présidence « arbitre-acteur »

Avec le général de Gaulle, la place du président bascule d’un arbitre discret vers un arbitre-acteur. En effet, il use d’outils constitutionnels pour gouverner par l’orientation et l’appel au peuple, tout en revendiquant une légitimité directe (surtout après 1962) qui redessine la pratique des institutions.

🗳️ Le référendum comme levier d’orientation (art. 11)

De Gaulle fait du référendum un instrument politique majeur : en 1962, il l’utilise pour instaurer l’élection du président au suffrage universel direct. Ce choix renforce la place du président en lui donnant une légitimité populaire sans équivalent. Plus largement, l’usage référendaire fonctionne comme un plébiscite : approuver la réforme, c’est aussi valider la ligne présidentielle. Pour replacer ce tournant, vois Constitution de 1958 et l’article Charles de Gaulle.

📉 Quand le peuple tranche : l’échec de 1969 et la démission

Cette stratégie comporte un coût : en 1969, le projet de réforme du Sénat et de la régionalisation est rejeté. Conformément à sa lecture « plébiscitaire » du référendum, de Gaulle démissionne. Ainsi, la place du président apparaît indissociable de la confiance populaire : l’appel au peuple magnifie l’autorité… ou la retire.

🛡️ L’exception dans l’État : l’article 16 (1961)

En 1961, durant la crise liée au putsch des généraux, de Gaulle déclenche l’article 16, concentrant provisoirement les pouvoirs pour assurer la continuité de l’État. Cette séquence, désormais plus étroitement encadrée depuis 2008, illustre la dimension de « garant suprême » attachée à la fonction. Elle nourrit aussi le débat sur l’équilibre des pouvoirs et la juste étendue de la place du président en temps de crise.

🏛️ Dissoudre pour clarifier : la dissolution de 1962 (art. 12)

Après la censure du gouvernement Pompidou en 1962, le président dissout l’Assemblée nationale. L’objectif : rechercher une majorité alignée et, par là, stabiliser l’action. La dissolution devient un outil de clarification démocratique, mais aussi une prise de risque ; elle participe de cette présidence qui impulse et tranche, sans renoncer au rôle d’arbitre fixé par l’article 5.

⚖️ « Arbitre-acteur » : une lecture majoritaire de l’exécutif

Dans la pratique gaullienne, le président impulse la direction politique quand il dispose d’une majorité. Le Premier ministre reste responsable devant l’Assemblée, mais l’Élysée fixe les grandes lignes ; la place du président se voit dans la diplomatie, la défense, et l’orientation générale. À l’inverse, en période de tension ou d’opposition, l’arbitre reprend le dessus : c’est l’élasticité du régime.

🧭 Après 1968 : continuités et ajustements

Les événements de Mai 68 bousculent le pouvoir, mais ne brisent pas l’architecture. La réponse combine dissolution (1968) et réaffirmation de l’autorité. Toutefois, l’usure se perçoit ; la lecture « plébiscitaire » atteint ses limites en 1969. Cette séquence confirme que la place du président est fortement dépendante du lien direct au corps électoral.

🔗 Héritages gaulliens et styles ultérieurs

Les successeurs héritent d’outils puissants : référendum, dissolution, pilotage de la politique étrangère, nominations clefs. Néanmoins, chaque style infléchit la portée réelle de la fonction. Pour une vue d’ensemble, croise avec Présidents marquants ; tu verras comment l’alternance, puis les cohabitations, redistribuent concrètement la place du président.

👉 Chapitre suivant — 🤝 Cohabitations et redéfinition de la fonction (#cohabitations). Pour le texte consolidé, tu peux consulter Légifrance.

🤝 Cohabitations et redéfinition de la fonction

Les cohabitations montrent la place du président en mode « réduit » à l’intérieur, mais renforcé sur le régalien. En effet, quand la majorité parlementaire est opposée au chef de l’État, le Premier ministre mène la politique intérieure. Toutefois, le président conserve l’autorité en défense et l’impulsion diplomatique. Cette alternance des centres de gravité révèle une Constitution souple et solide.

🧩 1986–1988 : Mitterrand / Chirac

La première cohabitation clarifie la règle du jeu. Le gouvernement, issu de la majorité à l’Assemblée, conduit l’économie et les réformes. Le président, lui, se concentre sur l’international, la défense et l’arbitrage institutionnel. Ainsi, la place du président devient plus « verticale » et moins « gestionnaire ». Pour les profils et styles, voir Présidents marquants.

🔁 1993–1995 : Mitterrand / Balladur

La deuxième cohabitation confirme la pratique. Le président veille à l’orientation extérieure et au tempo institutionnel, tandis que Matignon pilote les politiques publiques. Par conséquent, la place du président reste influente dans les domaines régaliens et symboliques. Cette séquence stabilise les usages et rassure sur la capacité d’adaptation du régime.

🔄 1997–2002 : Chirac / Jospin

La dissolution de 1997, perdue par le président, enclenche une cohabitation longue. Là encore, la politique intérieure devient l’apanage du Premier ministre. Néanmoins, la place du président demeure centrale en politique étrangère, en défense et dans la représentation de la Nation. Cette expérience longue nourrira ensuite la réforme du quinquennat et l’inversion du calendrier.

⚖️ Règles de partage et continuités

Dans chaque cohabitation, le président nomme le Premier ministre issu de la majorité (art. 8), préside le Conseil des ministres (art. 9) et reste chef des armées (art. 15). Cependant, l’initiative législative et l’agenda glissent vers Matignon. De plus, le dialogue entre têtes de l’exécutif devient une condition de stabilité. La place du président s’exprime alors surtout par la parole, le rôle international et les nominations clés.

🧭 Ce que les cohabitations nous apprennent

Elles prouvent que la Ve n’est ni présidentialiste pure ni parlementaire classique. Au contraire, elle est « à géométrie variable ». Avec majorité alignée, la fonction se présidentialise. En cohabitation, elle se « régalianise ». Pour comprendre le cadre juridique, revois Constitution de 1958 et, pour les évolutions, l’article Réformes institutionnelles.

👉 Chapitre suivant — ⏱️ Quinquennat et styles de présidence (#quinquennat-hyperpresidence). Pour les contextes sociaux et politiques, croise avec Mai 68 et réformes.

⏱️ Quinquennat et styles de présidence

Avec le passage au quinquennat et l’inversion du calendrier électoral, la place du président s’est transformée. En pratique, l’élection présidentielle cadence désormais toute la vie politique, tandis que les législatives suivent et donnent le plus souvent une majorité alignée. Par conséquent, la fonction se « présidentialise » davantage, surtout quand l’exécutif est uni.

🕰️ Du septennat au quinquennat : un tournant d’architecture

Le quinquennat réduit la durée du mandat et synchronise davantage le temps politique. Dans ce nouveau cadre, la campagne présidentielle pèse plus lourd : elle fixe le cap pour cinq ans. Ainsi, la place du président se renforce dans la définition des priorités, tandis que le risque de cohabitation diminue mécaniquement, sans toutefois disparaître.

🔁 Inversion du calendrier : effet de « majorité d’entraînement »

Le fait d’organiser les législatives après la présidentielle crée un puissant effet d’entraînement. Le corps électoral, dans son élan, confirme souvent la majorité sortante de l’élection reine. Dès lors, la place du président s’étend à l’agenda législatif : l’exécutif peut dérouler plus vite ses réformes. Pour replacer cette mécanique dans son contexte, vois Réformes institutionnelles et le cadre de la Constitution de 1958.

🏗️ Redéfinition du rôle du Premier ministre

Dans ce schéma, Matignon devient plus « opérationnel » : piloter, coordonner, traduire en textes et en budgets la ligne de l’Élysée. Cependant, la responsabilité politique du gouvernement devant l’Assemblée demeure. La place du président impulse et arbitre ; le Premier ministre met en musique et assume la reddition de comptes parlementaire.

🎛️ De l’« hyperprésidence » aux variations de style

La pratique post-quinquennat a vu émerger des styles contrastés : présidence de pilotage serré (« hyperprésidence »), présidence plus collégiale, ou présidence de surplomb dite « jupitérienne ». Chaque style module la place du président dans le quotidien gouvernemental : plus elle est directive, plus Matignon assume un rôle de mise en œuvre ; plus elle est distante, plus le Premier ministre incarne la conduite au jour le jour.

🌍 Diplomatie et défense : un surplomb structurel

Quinquennat ou non, l’international reste un domaine d’expression privilégié. En effet, chef des armées et figure de la politique étrangère, le président dispose d’une visibilité accrue sur les crises et sommets. De ce fait, la place du président se manifeste par la parole extérieure, les engagements européens et les grandes orientations stratégiques.

📊 Opinion, séquences et « temps long »

Le mandat de cinq ans favorise des séquences (cent jours, mi-mandat, fin de mandat) et une gestion fine de l’opinion. Toutefois, gouverner uniquement au rythme des sondages fragilise l’action publique. Par conséquent, la place du président s’évalue aussi à sa capacité à tenir un cap de long terme, malgré les aléas économiques, sociaux ou géopolitiques.

🗳️ Centralité de la présidentielle et verticalité accrue

Parce que la présidentielle ouvre le cycle, elle concentre enjeux, programmes et personnalisation du pouvoir. Ainsi, la place du président gagne en verticalité : incarnation, direction, arbitrage. Néanmoins, cette verticalité appelle des contrepoids efficaces (Parlement, Conseil constitutionnel, contrôle citoyen), que nous détaillerons au prochain chapitre.

🔗 Pour approfondir

Pour une synthèse pédagogique sur le quinquennat et l’inversion du calendrier, consulte Vie-publique. Mets en regard ces évolutions avec les styles présentés dans Présidents marquants afin de mesurer, concrètement, l’effet des pratiques sur la place du président.

👉 Chapitre suivant — 🧩 Contre-pouvoirs et débats contemporains (#contre-pouvoirs-debats).

🧩 Contre-pouvoirs et débats contemporains

La place du président est puissante, mais elle n’est ni absolue ni illimitée. En pratique, plusieurs contre-pouvoirs — juridiques, politiques et sociétaux — encadrent l’action de l’Élysée. Dès lors, l’équilibre institutionnel repose sur un jeu d’allers-retours entre initiative présidentielle, responsabilité gouvernementale et contrôle parlementaire et juridictionnel.

🏛️ Parlement : contrôle politique et temporalité législative

L’Assemblée nationale et le Sénat débattent, amendent et votent la loi ; ils contrôlent le gouvernement par questions, commissions d’enquête et motion de censure. Par conséquent, même avec une majorité alignée, l’agenda nécessite des arbitrages. En cohabitation, le centre de gravité glisse vers Matignon, ce qui relativise la place du président. Pour le cadre général, revois Constitution de 1958 et Réformes institutionnelles.

⚖️ Conseil constitutionnel : gardien des normes

Le Conseil peut être saisi a priori des lois (art. 61) et contrôle, depuis 2008, leur conformité a posteriori via la QPC. Ainsi, des pans de programme peuvent être censurés. De plus, le président nomme trois membres (art. 56), mais l’organe demeure indépendant dans ses décisions, ce qui borne la place du président par le droit. Pour approfondir, vois les dossiers du Conseil constitutionnel.

🛡️ Irresponsabilité pénale et destitution (art. 67–68)

Le chef de l’État bénéficie d’une irresponsabilité pénale durant le mandat (art. 67). Cependant, l’article 68 prévoit la destitution en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice du mandat. Cette procédure politique, lourde et encadrée, rappelle que la place du président est contrebalancée par un ultime garde-fou.

🌍 Europe et juges ordinaires : contraintes externes et internes

Les engagements européens, le contrôle de conventionnalité par les juges, et la jurisprudence de la CEDH bornent les politiques publiques. Par ricochet, la marge d’action présidentielle — surtout quand elle implique la loi — reste soumise aux standards supérieurs. Ainsi, la place du président s’exerce dans un État de droit multi-niveaux.

🗳️ Référendum d’initiative partagée et pétitions

Le référendum (art. 11) peut renforcer l’autorité présidentielle. Toutefois, le référendum d’initiative partagée introduit en 2008 offre une voie ascendante sous conditions. De plus, pétitions et mobilisations numériques pèsent sur l’agenda. Dès lors, l’appel direct au peuple n’est pas un monopole sans contrepartie.

📰 Opinion, médias et « responsabilité d’incarnation »

La figure présidentielle concentre attentes et critiques. En conséquence, l’opinion publique, les médias et les corps intermédiaires imposent des coûts politiques aux choix élyséens. Cette « responsabilité d’incarnation » n’est pas juridique, mais elle influe sur la durée, le style et le tempo des réformes, réévaluant en continu la place du président.

🔍 Transparence, éthique et autorités indépendantes

Autorités administratives indépendantes, règles de déontologie, obligations de transparence et contrôle budgétaire renforcent l’écosystème du contre-pouvoir. Ainsi, la décision présidentielle s’inscrit dans un réseau d’expertises et de vérifications. Pour un panorama pédagogique, consulte Vie-publique.

🧭 Bilan : une puissance encadrée par le droit et la pratique

En définitive, le texte donne des leviers forts ; la pratique et les contrôles en tempèrent l’usage. Avec majorité alignée, la fonction se verticalise. En tension ou cohabitation, elle se reconfigure. C’est précisément dans cette plasticité que se joue, aujourd’hui encore, la place du président.

👉 Chapitre suivant — 🧠 À retenir (#retenir), puis ❓ FAQ (#faq) et 🧩 Quiz (#quiz).

🧠 À retenir

  • Depuis 1958, la place du président combine rôle d’arbitre (art. 5) et capacité d’action (référendum art. 11, dissolution art. 12, pouvoirs exceptionnels art. 16).
  • Le suffrage universel direct (1962) a renforcé sa légitimité et son poids politique, surtout avec une majorité alignée à l’Assemblée.
  • En cohabitation, la fonction se « régalianise » : diplomatie et défense dominent, Matignon pilote l’intérieur.
  • Le quinquennat et l’inversion du calendrier ont accru la présidentialisation en réduisant le risque de cohabitation.
  • Contre-pouvoirs essentiels : Parlement (contrôle), Conseil constitutionnel (censure), juges et normes européennes (bornes juridiques).
  • La pratique varie selon les styles (hyperprésidence, surplomb « jupitérien », collégialité) et selon les crises.

❓ FAQ : Questions fréquentes sur la place du président

Le président peut-il « gouverner » seul sous la Ve République ?

Non. Il impulse et arbitre, nomme le Premier ministre, préside le Conseil des ministres et dispose de pouvoirs propres. Mais le gouvernement est responsable devant l’Assemblée, et la loi reste votée par le Parlement, sous le contrôle du Conseil constitutionnel.

La cohabitation supprime-t-elle l’influence du président ?

Pas du tout. Elle la reconfigure : la politique intérieure est menée par le Premier ministre, tandis que le président conserve un rôle déterminant en diplomatie et en défense, et demeure l’incarnation de la Nation.

Qu’a changé le quinquennat pour la place du président ?

Il synchronise les cycles électoraux avec l’inversion du calendrier, ce qui crée un effet de majorité d’entraînement après la présidentielle et renforce la capacité du président à dérouler son programme.

Le président peut-il convoquer un référendum sur n’importe quel sujet ?

Non. L’article 11 encadre les matières (organisation des pouvoirs publics, réformes économiques, sociales ou environnementales…). Depuis 2008, un référendum d’initiative partagée existe, mais avec des seuils élevés.

À quoi servent les « pouvoirs exceptionnels » de l’article 16 ?

À faire face à une menace grave et immédiate contre les institutions ou la Nation. Ils sont temporaires, encadrés depuis 2008 et très controversés, car ils concentrent provisoirement de larges pouvoirs à l’Élysée.

🧩 Quiz — La place du président sous la Ve République

1. Quel article définit le président comme « arbitre » et garant des institutions ?


2. Depuis 1962, le président est élu :


3. L’outil constitutionnel pour dissoudre l’Assemblée nationale est prévu à :


4. Le référendum « législatif » appartient principalement à quel article ?


5. En cohabitation, qui conduit la politique intérieure ?


6. L’article 16 concerne :


7. Qui nomme le Premier ministre ?


8. Quel article fait du président le chef des armées ?


9. L’inversion du calendrier électoral a pour effet principal :


10. Le président préside le Conseil des ministres en vertu de :


11. Qui peut saisir le Conseil constitutionnel sur une loi avant sa promulgation ?


12. La « QPC » permet :


13. L’article 13 concerne principalement :


14. En cohabitation, la « place du président » se concentre surtout sur :


15. Quel risque majeur accompagne une dissolution ?


16. Le référendum d’initiative partagée (RIP) a été introduit en :


17. Le président négocie et ratifie les traités selon :


18. Quel concept résume la pratique d’un pilotage très serré depuis l’Élysée ?


19. Quelle formule caractérise le régime de la Ve République selon les périodes ?


20. Parmi ces actes, lequel est un pouvoir propre (sans contreseing) du président ?



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