🗳️ Déficit démocratique et réformes institutionnelles de l’UE : enjeux et évolutions

🎯 Pourquoi la question démocratique est-elle centrale pour l’Europe ?

La construction européenne, débutée dans les années 1950, a longtemps reposé sur une légitimité par les résultats économiques, laissant parfois de côté la participation directe des peuples. Cependant, avec l’élargissement des compétences de l’Union, la critique du déficit démocratique et des réformes institutionnelles de l’UE est devenue un sujet brûlant, remettant en cause le fonctionnement même de Bruxelles. Ce débat oppose souvent une vision technocratique efficace à une exigence de souveraineté populaire, obligeant les institutions à se réformer en profondeur au fil des traités. Comprendre cette dynamique est essentiel pour saisir comment l’Europe tente aujourd’hui de se rapprocher de ses citoyens.

🗂️ Dans cet article, tu vas découvrir :

👉 Poursuivons avec le premier chapitre pour bien comprendre les racines de ce débat complexe.

🏛️ Les origines et la définition du « déficit démocratique »

📌 Une construction technocratique assumée à l’origine

Pour bien comprendre la notion de déficit démocratique et réformes institutionnelles de l’UE, il faut remonter aux pères fondateurs. Dans les années 1950, la construction européenne, sous l’impulsion de Jean Monnet et Robert Schuman, suit une logique fonctionnaliste. L’idée est de créer des solidarités de fait, principalement économiques (CECA, CEE), gérées par une « Haute Autorité » (ancêtre de la Commission) composée d’experts indépendants. À cette époque, la légitimité est technocratique : on juge l’Europe sur sa capacité à garantir la paix et la prospérité, et non sur la participation directe des électeurs aux décisions.

Ce système fonctionnait grâce à ce que les politologues appellent le « consensus permissif ». Les peuples européens, satisfaits de la croissance des Trente Glorieuses, laissaient les élites politiques et les experts gérer l’intégration communautaire. Il n’y avait pas de demande forte pour un contrôle parlementaire strict au niveau supranational, car les décisions touchaient peu la vie quotidienne immédiate des citoyens, se concentrant sur les droits de douane ou le charbon.

Cependant, cette méthode a créé un déséquilibre institutionnel durable. Le pouvoir d’initiative et d’exécution a été confié à la Commission européenne, un organe non élu, tandis que le pouvoir de décision revenait au Conseil (les ministres des États membres), qui délibérait souvent à huis clos. Cette structure a nourri l’accusation selon laquelle l’Europe se construisait « sans les peuples », voire contre eux, en contournant les parlements nationaux.

📌 Les critiques structurelles du système institutionnel

L’expression « déficit démocratique » apparaît réellement dans le débat public à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Elle désigne le fossé grandissant entre les pouvoirs transférés à l’Union européenne et la capacité des citoyens à influencer ces pouvoirs. Les critiques se focalisent sur plusieurs points précis. D’abord, l’absence de véritable « gouvernement » responsable devant les électeurs : la Commission européenne n’est pas sanctionnée directement par les urnes, contrairement à un gouvernement national.

Ensuite, le rôle longtemps secondaire du Parlement européen est pointé du doigt. Jusqu’à l’Acte unique européen de 1986, l’assemblée de Strasbourg n’avait qu’un pouvoir consultatif sur la plupart des sujets. Pour approfondir ce rôle initial limité, tu peux consulter notre article sur l’histoire et les pouvoirs du Parlement européen. Les lois européennes étaient donc décidées par des ministres nationaux (le Conseil) et des commissaires non élus, créant une rupture dans la chaîne de légitimité démocratique.

Enfin, la complexité même du système institutionnel éloigne le citoyen. La « méthode communautaire », avec ses compromis opaques et son jargon technique, rend difficile l’identification des responsables politiques. Qui blâmer si une directive européenne ne convient pas ? Le Commissaire ? Le ministre national qui a voté à Bruxelles ? Le député européen ? Cette dilution de la responsabilité est au cœur du problème du déficit démocratique.

📌 Légitimité d’input vs Légitimité d’output

Les politologues, comme Fritz Scharpf, distinguent deux types de légitimité pour analyser l’UE. La légitimité d’input (légitimité par les intrants) concerne le processus de décision : est-il démocratique ? Représente-t-il la volonté du peuple ? C’est ici que l’UE a historiquement péché, car le lien entre le vote du citoyen et la politique menée à Bruxelles est ténu. Les élections européennes, souvent considérées comme des élections de second ordre, n’aboutissent pas automatiquement à un changement de majorité politique claire comme au niveau national.

À l’inverse, l’UE a longtemps misé sur la légitimité d’output (légitimité par les résultats). Si l’Europe apporte la paix, le marché unique, la liberté de circulation et la stabilité monétaire, alors elle est justifiée aux yeux des citoyens. C’est l’argument de l’efficacité. Tant que la machine produit des résultats positifs, le manque de participation directe est toléré.

Le problème survient lorsque les résultats ne sont plus au rendez-vous, comme lors des crises économiques ou migratoires récentes. Si l’efficacité (output) baisse, l’absence de légitimité démocratique (input) devient insupportable pour les citoyens. C’est ce mécanisme qui a forcé les États membres à engager une série de réformes institutionnelles majeures pour tenter de combler ce déficit.

🗳️ La montée en puissance du Parlement européen : première réponse

📌 1979 : L’élection au suffrage universel direct

La première grande réforme pour contrer le déficit démocratique et les réformes institutionnelles de l’UE date de 1979. Avant cette date, les députés européens étaient désignés par les parlements nationaux parmi leurs propres membres. Ils n’avaient donc pas de mandat direct du peuple européen. La décision de faire élire le Parlement européen au suffrage universel direct a marqué un tournant symbolique majeur. Pour la première fois, il existait une légitimité démocratique directe au niveau supranational.

Cette élection a transformé la nature de l’assemblée. Les députés, désormais élus pour cinq ans directement par les citoyens, ont gagné en assurance politique. Ils se sont sentis investis d’une mission : représenter les peuples d’Europe face à la technocratie de la Commission et à la diplomatie du Conseil. C’est le début d’un long combat institutionnel pour acquérir de vrais pouvoirs législatifs.

Cependant, l’élection de 1979 n’a pas suffi à elle seule à régler le problème. Le taux de participation a eu tendance à baisser scrutin après scrutin (jusqu’au rebond de 2019), et les campagnes électorales restaient très nationales. Les partis politiques européens peinaient à émerger, et les citoyens votaient souvent pour sanctionner leur gouvernement national plutôt que pour choisir une orientation européenne.

📌 De l’Acte unique à la procédure de coopération

Face à un Parlement désormais élu mais sans grand pouvoir, les États membres ont dû concéder des réformes. L’Acte unique européen de 1986, qui visait à achever le marché intérieur, a introduit la procédure de « coopération ». Elle permettait au Parlement d’amender les textes législatifs, même si le Conseil gardait le dernier mot. C’était une première brèche dans le monopole législatif du Conseil.

Cette évolution répondait à une logique simple : on ne pouvait pas transférer autant de compétences économiques à l’Europe (marché unique, normes environnementales) sans un contrôle démocratique accru. Le Parlement européen a su utiliser intelligemment ces nouveaux pouvoirs pour peser sur les décisions, notamment en matière de protection des consommateurs et d’environnement.

L’Acte unique a également renforcé le rôle du Parlement dans l’approbation des accords internationaux et l’élargissement de l’UE. En conditionnant son accord (avis conforme), le Parlement a pu exiger des clauses sur les droits de l’homme dans les traités commerciaux avec des pays tiers. Tu peux voir ici comment la Commission européenne a dû composer de plus en plus avec cette assemblée revendicative.

📌 L’extension du contrôle budgétaire et politique

Parallèlement au pouvoir législatif, le Parlement a renforcé son contrôle sur l’exécutif, c’est-à-dire la Commission. Dès les années 1970, il avait obtenu le pouvoir de rejeter le budget communautaire, une « arme atomique » qu’il a utilisée pour forcer le Conseil à négocier. Ce pouvoir budgétaire est le fondement historique de tout parlement : le consentement à l’impôt et à la dépense.

Sur le plan politique, le Parlement dispose du droit de censure sur la Commission. Si une motion de censure est votée à la majorité des deux tiers, le collège des commissaires doit démissionner collectivement. Bien que cette arme n’ait jamais été utilisée formellement jusqu’au bout, la menace a été suffisante pour provoquer la chute de la Commission Santer en 1999, suite à des allégations de fraude et de népotisme. Cet événement a prouvé que la responsabilité politique commençait à devenir une réalité à Bruxelles.

En outre, le Parlement a instauré des commissions d’enquête temporaires sur des sujets sensibles (vache folle, transport des animaux, écoutes Echelon, plus récemment Pegasus). Ces enquêtes permettent de mettre en lumière les dysfonctionnements de l’administration européenne ou des États membres, renforçant la transparence et le lien avec les préoccupations citoyennes.

📜 Le tournant du traité de Maastricht : Citoyenneté et Codécision

📌 La création de la citoyenneté européenne

Le traité de Maastricht, signé en 1992, marque une étape fondamentale dans l’histoire du déficit démocratique et des réformes institutionnelles de l’UE. Pour la première fois, l’Europe ne se définit plus seulement comme une communauté économique, mais comme une union politique. Pour incarner cette union, le traité crée la citoyenneté européenne. Désormais, « est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un État membre ».

Cette citoyenneté superposée (elle ne remplace pas la nationale) octroie des droits politiques concrets : le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales et européennes dans l’État de résidence, le droit de pétition devant le Parlement européen, et le droit de s’adresser au Médiateur européen. C’est une tentative claire de rapprocher l’Europe du citoyen en lui donnant un statut juridique direct vis-à-vis de l’Union.

Pourtant, la ratification de Maastricht a été douloureuse. Le « Non » au référendum danois et le « petit Oui » (51,04%) au référendum français ont révélé une fracture grandissante entre les élites pro-européennes et une partie des peuples inquiets de la perte de souveraineté. Ce moment a sonné la fin du « consensus permissif » et a obligé les dirigeants à justifier davantage chaque nouvelle étape de l’intégration.

📌 L’introduction de la procédure de codécision

Pour répondre aux critiques sur le manque de démocratie, Maastricht invente la procédure de codécision (article 251 du traité CE). C’est une révolution institutionnelle : sur certaines matières, le Parlement européen devient l’égal du Conseil. Une loi ne peut être adoptée que si les deux institutions sont d’accord. Le Parlement n’est plus seulement consulté ou en coopération, il devient co-législateur à part entière.

Au départ limitée à quelques domaines (libre circulation, protection des consommateurs, santé, culture), la codécision va progressivement s’étendre avec les traités suivants (Amsterdam en 1997, Nice en 2001). C’est la réponse institutionnelle majeure au déficit démocratique : si le Parlement élu par le peuple vote la loi avec le Conseil, alors la loi est démocratique.

Cette réforme a modifié l’équilibre des pouvoirs. La Commission ne peut plus simplement s’allier avec le Conseil ; elle doit convaincre les députés européens dès le début du processus législatif. Cela a politisé les débats et rendu les enjeux plus visibles, même si la complexité des « trilogues » (réunions informelles entre Parlement, Conseil et Commission) reste critiquée pour son opacité.

📌 Le rôle des parlements nationaux et le Comité des régions

Maastricht a aussi tenté d’impliquer d’autres niveaux de pouvoir. Le traité crée le Comité des régions, un organe consultatif composé de représentants des collectivités locales et régionales. L’idée est de donner une voix aux territoires, souvent plus proches des citoyens que les gouvernements centraux, et de respecter le principe de subsidiarité (l’Europe n’intervient que si elle est plus efficace que l’échelon national ou local).

Le rôle des parlements nationaux (Assemblée nationale, Bundestag, etc.) est également mentionné pour la première fois. Ils doivent être informés des propositions législatives européennes en amont. C’est la reconnaissance que la légitimité démocratique de l’UE repose sur une double voie : le Parlement européen (représentant les citoyens de l’Union) et les parlements nationaux (représentant les peuples des États).

Malgré ces avancées, le sentiment de déficit a perduré. Les années 1990 et 2000 ont été marquées par une course entre l’élargissement à l’Est (plus de pays, plus de diversité) et la nécessité d’approfondissement institutionnel. Les traités d’Amsterdam et de Nice ont été jugés insuffisants, ne faisant que des ajustements techniques sans régler la question du sens et de l’adhésion populaire au projet européen.

⚖️ Le traité de Lisbonne : vers une parlementarisation complète ?

📌 L’échec de la Constitution et le rebond de Lisbonne

Au début des années 2000, l’UE lance une Convention sur l’avenir de l’Europe pour rédiger une « Constitution européenne ». L’objectif est ambitieux : simplifier les traités, rendre l’Europe plus lisible et plus démocratique. Mais le rejet de ce texte par référendum en France et aux Pays-Bas en 2005 provoque une crise institutionnelle majeure. Le diagnostic est clair : les citoyens ne comprennent pas où va l’Europe et craignent une dérive néolibérale ou une perte d’identité.

Après une période de réflexion, les dirigeants s’accordent sur le traité de Lisbonne, signé en 2007 et entré en vigueur en 2009. Ce traité reprend la quasi-totalité des innovations institutionnelles de la Constitution défunte, mais sans le vocabulaire symbolique (pas de drapeau, pas d’hymne dans le texte, pas de mot « Constitution »). C’est une réponse pragmatique pour sauver les réformes nécessaires au fonctionnement d’une Europe à 27 membres.

Lisbonne place la démocratie au cœur de ses premiers articles. L’article 10 du TUE affirme : « Le fonctionnement de l’Union est fondé sur la démocratie représentative ». Il reconnait explicitement le rôle des partis politiques européens pour exprimer la volonté des citoyens. C’est une affirmation forte : l’UE n’est pas qu’une organisation internationale, c’est une démocratie transnationale en devenir.

📌 L’extension massive de la procédure législative ordinaire

Le grand apport de Lisbonne est la généralisation de la codécision, rebaptisée procédure législative ordinaire. Désormais, le Parlement européen décide sur un pied d’égalité avec le Conseil dans plus de 40 nouveaux domaines, y compris l’agriculture (PAC), la justice, la sécurité et l’immigration. Pour comprendre le détail de ce mécanisme, je t’invite à lire l’article sur la procédure législative ordinaire.

Le Parlement obtient aussi le pouvoir d’élire le président de la Commission européenne, sur proposition du Conseil européen, en tenant compte du résultat des élections européennes. Cela crée un lien direct entre le vote des citoyens et la tête de l’exécutif européen (nous y reviendrons avec le système des Spitzenkandidaten). Le budget de l’UE est désormais entièrement soumis à l’approbation parlementaire, supprimant la distinction archaïque entre dépenses obligatoires et non obligatoires.

Cette « parlementarisation » du système politique de l’UE vise à reproduire le modèle des démocraties nationales : une chambre élue qui vote la loi et contrôle l’exécutif. C’est une réponse puissante aux critiques sur le déficit démocratique, faisant du Parlement européen l’un des parlements les plus puissants au monde en termes de pouvoir législatif réel, contrairement à de nombreuses assemblées nationales souvent dominées par leur gouvernement.

📌 Le contrôle de subsidiarité par les parlements nationaux

Lisbonne renforce considérablement le rôle des parlements nationaux pour s’assurer que l’Europe n’outrepasse pas ses droits. Un mécanisme d’alerte précoce est mis en place : le « carton jaune ». Si un tiers des parlements nationaux estime qu’une proposition de la Commission ne respecte pas le principe de subsidiarité (c’est-à-dire que l’action serait mieux menée au niveau national), la Commission doit réexaminer sa copie.

Si la Commission maintient sa proposition, elle doit se justifier, et le Parlement européen ainsi que le Conseil peuvent bloquer le texte (mécanisme du « carton orange »). Bien que complexe à mettre en œuvre (nécessitant une coordination rapide entre 27 parlements), ce système offre une garantie démocratique supplémentaire. Il rassure les souverainistes en montrant que les élus nationaux gardent un œil sur « Bruxelles ».

De plus, les parlements nationaux sont désormais pleinement impliqués dans le contrôle d’Europol et d’Eurojust (coopération policière et judiciaire), des domaines régaliens sensibles. Le traité de Lisbonne tente ainsi de créer une « double légitimité » démocratique, combinant représentation européenne et représentation nationale.

📣 L’émergence d’une démocratie participative et citoyenne

📌 L’Initiative Citoyenne Européenne (ICE)

Au-delà de la démocratie représentative, le traité de Lisbonne introduit une innovation majeure de démocratie directe : l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE). Cet outil permet à un million de citoyens, issus d’au moins sept États membres différents, d’inviter la Commission européenne à présenter une proposition législative. C’est un droit d’initiative populaire transnational, une première mondiale à cette échelle.

L’objectif de l’ICE est de donner la parole à la société civile et de mettre à l’agenda politique des sujets que les institutions auraient pu ignorer. Depuis son lancement, plusieurs initiatives ont réussi à recueillir les signatures nécessaires, comme « Right2Water » (sur le droit à l’eau) ou « End the Cage Age » (contre l’élevage en cage). Cela oblige la Commission à recevoir les organisateurs et à répondre officiellement, même si elle n’est pas obligée de légiférer.

Pour en savoir plus sur les détails de ces procédures, tu peux consulter le site officiel de l’Union européenne sur l’Initiative Citoyenne Européenne. Bien que critiquée pour sa complexité et le faible taux de transformation en lois réelles, l’ICE reste un symbole fort de l’ouverture de l’UE vers une participation plus active de ses habitants.

📌 Transparence et dialogue avec la société civile

Le déficit démocratique et les réformes institutionnelles de l’UE concernent aussi la transparence. L’article 11 du TUE impose aux institutions d’entretenir un « dialogue ouvert, transparent et régulier » avec les associations représentatives et la société civile. La Commission organise systématiquement des consultations publiques en ligne avant de proposer une nouvelle loi, permettant aux citoyens, entreprises et ONG de donner leur avis.

Un Registre de transparence a été mis en place pour encadrer le lobbying. Les représentants d’intérêts qui souhaitent accéder aux institutions doivent s’y inscrire et déclarer leurs budgets et leurs clients. Bien que ce système soit encore perfectible (il n’est pas obligatoire pour toutes les rencontres avec le Conseil, par exemple), il vise à lever le voile sur l’influence des groupes de pression à Bruxelles, souvent source de fantasmes et de méfiance.

L’accès aux documents est également un droit fondamental garanti par les traités. Tout citoyen peut demander à consulter les documents du Parlement, du Conseil ou de la Commission. La Cour de justice de l’UE (CJUE) joue un rôle clé pour faire respecter ce droit, sanctionnant les institutions qui refusent l’accès sans motif valable. Tu peux découvrir le rôle de la Cour dans notre article sur la CJUE et les institutions de contrôle.

📌 Le rôle du Médiateur européen

Créé par le traité de Maastricht, le Médiateur européen (Ombudsman) est une figure clé de la protection des citoyens face à l’administration. Élu par le Parlement européen, il est chargé d’enquêter sur les cas de « mauvaise administration » dans l’action des institutions, organes et organismes de l’UE. Cela peut aller du refus d’accès à un document à des retards de paiement, en passant par des discriminations ou des conflits d’intérêts.

Le Médiateur n’a pas de pouvoir de sanction contraignant, mais son autorité morale est forte. Ses rapports publics et ses recommandations sont souvent suivis d’effets, car les institutions craignent la mauvaise publicité. Emily O’Reilly, Médiatrice depuis 2013, a par exemple beaucoup œuvré pour plus de transparence dans les négociations commerciales (TTIP) et au sein du Conseil.

Ce mécanisme offre une voie de recours extrajudiciaire, gratuite et simple pour les citoyens, renforçant le sentiment que l’administration européenne est redevable. C’est une pièce essentielle du puzzle pour combler le fossé entre les « bureaucrates de Bruxelles » et le public.

🔮 Les défis contemporains et l’avenir institutionnel

📌 Le système des « Spitzenkandidaten » : succès et limites

Pour politiser les élections européennes et donner aux électeurs le choix du président de la Commission, les partis européens ont mis en place en 2014 le système des « Spitzenkandidaten » (têtes de liste). L’idée est simple : chaque famille politique désigne son candidat à la présidence de la Commission avant les élections. Le candidat du parti qui arrive en tête doit logiquement obtenir le poste.

En 2014, cela a fonctionné : le PPE est arrivé en tête et son candidat, Jean-Claude Juncker, a été élu président de la Commission. C’était une avancée démocratique majeure, transformant le scrutin en une véritable compétition pour l’exécutif européen. Cependant, en 2019, le Conseil européen a refusé de nommer Manfred Weber (candidat du PPE) ou Frans Timmermans (socialiste), préférant une personnalité extérieure, Ursula von der Leyen. Cela a été perçu par beaucoup comme un recul démocratique et un retour aux arrangements de couloirs entre chefs d’État.

Cet épisode montre la tension persistante entre la logique supranationale (le Parlement décide) et la logique intergouvernementale (les États décident). Pour approfondir le rôle du Conseil dans ces nominations, réfère-toi à l’article sur le Conseil européen et le Conseil de l’UE.

📌 La montée de l’euroscepticisme et le Brexit

Malgré toutes ces réformes, le sentiment de déficit démocratique n’a pas disparu. Il s’est même transformé en contestation radicale avec la montée des partis populistes et eurosceptiques dans de nombreux États membres. Le Brexit (vote en 2016, sortie en 2020) a été l’expression ultime de ce rejet : une majorité de Britanniques a considéré que l’UE était une entité non démocratique empiétant sur la souveraineté nationale (« Take back control »).

Ce séisme a forcé l’UE à se remettre en question. Il a démontré que l’ajout de pouvoirs au Parlement européen ne suffisait pas si les citoyens ne se sentaient pas émotionnellement et politiquement liés au projet. La complexité de l’UE reste un obstacle majeur. Le débat s’est déplacé : le problème n’est peut-être plus tant le manque de procédures démocratiques (qui sont nombreuses aujourd’hui) que le manque d’un véritable « demos » (peuple) européen et d’un espace public commun où débattre des enjeux.

Face à cela, certains proposent de renforcer l’Europe des nations, tandis que d’autres plaident pour un saut fédéral avec des listes transnationales aux élections européennes, permettant aux citoyens de voter pour les mêmes candidats dans toute l’Europe, créant ainsi un vrai débat politique continental.

📌 La Conférence sur l’avenir de l’Europe

La réponse la plus récente au besoin de renouveau démocratique a été la Conférence sur l’avenir de l’Europe (2021-2022). Cet exercice inédit a réuni des panels de citoyens tirés au sort, des élus et des représentants de la société civile pour débattre des réformes nécessaires. Les citoyens ont proposé des changements audacieux : fin de l’unanimité au Conseil (qui paralyse souvent les décisions), renforcement des pouvoirs du Parlement, plus de référendums européens.

Les conclusions de cette conférence ouvrent la voie à une potentielle révision des traités. Cependant, la volonté politique des États membres reste l’inconnue majeure. Beaucoup de gouvernements sont réticents à lancer une convention de révision, craignant d’ouvrir la boîte de Pandore. Le débat sur le déficit démocratique et les réformes institutionnelles de l’UE est donc loin d’être clos ; il est consubstantiel à la nature unique de l’Union, cet « objet politique non identifié » en perpétuelle mutation.

Pour une analyse plus large des enjeux démocratiques, le site Vie Publique propose des synthèses accessibles sur ces questions institutionnelles.

🧠 À retenir sur le déficit démocratique et les réformes de l’UE

  • Le déficit démocratique désigne le fossé entre les pouvoirs croissants de l’UE et le faible contrôle exercé par les citoyens (légitimité technocratique vs démocratique).
  • L’élection du Parlement européen au suffrage universel direct en 1979 est la première grande réponse institutionnelle.
  • Le traité de Maastricht (1992) a créé la citoyenneté européenne et introduit la procédure de codécision, faisant du Parlement un co-législateur.
  • Le traité de Lisbonne (2007) a généralisé la procédure législative ordinaire et renforcé le rôle des parlements nationaux (mécanisme du carton jaune).
  • Des outils de démocratie participative comme l’Initiative Citoyenne Européenne tentent d’impliquer directement la société civile, malgré des limites persistantes.

❓ FAQ : Questions fréquentes sur la démocratie européenne

🧩 Pourquoi dit-on que la Commission européenne n’est pas démocratique ?

C’est une critique fréquente car les Commissaires ne sont pas élus directement par les citoyens, mais nommés par les États membres. Cependant, leur nomination doit être approuvée par le Parlement européen (élu), qui peut aussi les censurer, ce qui offre une légitimité indirecte.

🧩 Qu’est-ce que la procédure de codécision ?

Aujourd’hui appelée « procédure législative ordinaire », c’est le processus par lequel le Parlement européen et le Conseil de l’UE (les ministres) doivent se mettre d’accord sur un texte de loi pour qu’il soit adopté. Ils ont un poids égal dans la décision.

🧩 À quoi sert une Initiative Citoyenne Européenne (ICE) ?

Elle permet à 1 million de citoyens d’au moins 7 pays de l’UE de demander à la Commission de proposer une loi sur un sujet précis. C’est un outil de démocratie participative, même si la Commission n’est pas obligée d’accéder à la demande.

🧩 Quiz – Institutions et démocratie européenne

1. En quelle année le Parlement européen a-t-il été élu au suffrage universel direct pour la première fois ?



2. Quel traité a créé la « citoyenneté européenne » ?



3. Quelle institution représente directement les citoyens de l’Union ?



4. Comment appelle-t-on la légitimité basée sur l’efficacité des résultats politiques ?



5. Quel mécanisme permet aux parlements nationaux de contester une loi européenne pour non-respect de la subsidiarité ?



6. Combien de signatures sont nécessaires pour valider une Initiative Citoyenne Européenne (ICE) ?



7. Quel traité, signé en 2007, a renforcé les pouvoirs du Parlement européen ?



8. Qui élit le Médiateur européen ?



9. Quelle procédure législative met le Parlement et le Conseil sur un pied d’égalité ?



10. Quel terme allemand désigne le système des « têtes de liste » aux élections européennes ?



11. Quelle commission a dû démissionner collectivement en 1999 sous la pression du Parlement ?



12. Dans quel pays le projet de Constitution européenne a-t-il été rejeté par référendum en 2005 ?



13. Lequel de ces droits N’EST PAS lié à la citoyenneté européenne ?



14. Quel organe consultatif représente les collectivités locales et régionales ?



15. Qu’est-ce que le « consensus permissif » des débuts de la construction européenne ?



16. Qui a été élu président de la Commission en 2014 grâce au système des Spitzenkandidaten ?



17. Quel événement majeur de 2016 a illustré le rejet démocratique de l’UE par un État membre ?



18. Quel outil permet d’encadrer l’action des lobbys auprès des institutions ?



19. Quelle conférence s’est tenue en 2021-2022 pour associer les citoyens aux réformes ?



20. L’article 10 du Traité sur l’Union européenne affirme que le fonctionnement de l’Union est fondé sur :



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