đŻ Pourquoi la fin de la monarchie est-elle un tournant majeur ?
La fin de la monarchie en France ne tombe pas du ciel : elle naĂźt dâune crise politique, sociale et financiĂšre ouverte avec les Ătats gĂ©nĂ©raux, puis accĂ©lĂ©rĂ©e par lâirruption du peuple et des clubs. De 1789 Ă 1792, chaque mois compte. La prise de la Bastille fracture lâordre ancien ; ensuite, les institutions hĂ©sitent, tandis que la rue, la guerre et la presse prĂ©cipitent la chute du trĂŽne.
Comprendre ce basculement, câest suivre un enchaĂźnement : crise de la royautĂ©, insurrections urbaines, rĂ©formes inabouties, radicalisation populaire, guerre mal engagĂ©e et, finalement, dĂ©chĂ©ance du roi. Tu verras des repĂšres simples, des dates clĂ©s et des liens avec la DĂ©claration des droits et la figure de Robespierre, pour saisir comment naĂźt la Ire RĂ©publique.
đïž Dans cet article, tu vas dĂ©couvrir :
- đ Des crises qui Ă©branlent le trĂŽne (1789-1791)
- đ„ Des journĂ©es populaires qui font lâhistoire
- đïž Une Constitution qui ne suffit pas
- âïž La guerre qui radicalise tout (printemps-Ă©tĂ© 1792)
- đ° 10 aoĂ»t 1792 : la chute de la monarchie
- đ HĂ©ritages et nouveaux horizons rĂ©publicains
- đ§ Ă retenir
- â FAQ
- đ§© Quiz
đ Poursuivons avec le contexte : pourquoi la monarchie rĂ©forme sans convaincre, jusquâĂ se retrouver dĂ©bordĂ©e.
đ Des crises qui Ă©branlent le trĂŽne (1789-1791)
La fin de la monarchie ne se joue pas en un jour. Elle est le produit dâune succession de crises profondes qui Ă©branlent peu Ă peu la royautĂ© entre 1789 et 1791. DĂšs lâouverture des Ătats gĂ©nĂ©raux, convoquĂ©s par Louis XVI pour rĂ©soudre une grave crise financiĂšre, le roi perd la maĂźtrise du processus. Les dĂ©putĂ©s du Tiers Ătat refusent de se dissoudre et se proclament « AssemblĂ©e nationale » en juin 1789. Câest un basculement politique majeur : pour la premiĂšre fois, la souverainetĂ© est revendiquĂ©e au nom de la nation et non plus concentrĂ©e dans la personne du roi.
Cette rupture institutionnelle se double dâune mobilisation populaire sans prĂ©cĂ©dent. Le serment du Jeu de paume, le 20 juin 1789, illustre la dĂ©termination des dĂ©putĂ©s Ă ne pas cĂ©der. Quelques semaines plus tard, la prise de la Bastille, symbole du despotisme royal, marque lâĂ©chec de la rĂ©pression par la force. Louis XVI est contraint de reconnaĂźtre la cocarde tricolore et de se rendre Ă Paris : la monarchie absolue est dĂ©sormais Ă genoux, mĂȘme si elle nâest pas encore officiellement abolie.
đ§ RĂ©formes et limites
LâAssemblĂ©e nationale mĂšne des rĂ©formes dâampleur. Dans la nuit du 4 aoĂ»t 1789, les privilĂšges fĂ©odaux sont abolis, mettant fin Ă lâordre social hĂ©ritĂ© du Moyen Ăge. Quelques semaines plus tard, la DĂ©claration des droits de lâhomme et du citoyen proclame des principes universels : libertĂ©, Ă©galitĂ©, souverainetĂ© nationale. Pourtant, si le texte inspire lâenthousiasme, il ne rĂšgle pas toutes les tensions. Les inĂ©galitĂ©s sociales persistent, et beaucoup de Français attendent des rĂ©formes concrĂštes dans leur vie quotidienne : pain moins cher, justice plus Ă©quitable, impĂŽts mieux rĂ©partis.
Dans le mĂȘme temps, la cour hĂ©site et multiplie les maladresses. Marie-Antoinette est perçue comme hostile aux rĂ©formes, ce qui alimente les caricatures et les rumeurs dans les journaux. Les clubs, comme les Jacobins ou les Cordeliers, deviennent des lieux de politisation intense, oĂč lâon critique ouvertement la monarchie et oĂč lâon dĂ©fend de plus en plus lâidĂ©e rĂ©publicaine. Lâopinion publique, stimulĂ©e par la presse et les pamphlets, devient un acteur politique Ă part entiĂšre.
⥠Deux légitimités face à face
Peu Ă peu, deux lĂ©gitimitĂ©s irrĂ©conciliables sâaffrontent. Dâun cĂŽtĂ©, celle du roi, hĂ©ritier de la tradition monarchique et encore chef de lâexĂ©cutif. De lâautre, celle de la nation, incarnĂ©e par lâAssemblĂ©e et soutenue par les foules urbaines. La monarchie constitutionnelle, qui se dessine en 1791, tente de concilier ces deux forces, mais la confiance est dĂ©jĂ profondĂ©ment brisĂ©e. Chaque dĂ©cision royale, chaque veto, chaque signe dâhĂ©sitation est interprĂ©tĂ© comme une trahison.
En rĂ©alitĂ©, la crise de 1789-1791 prĂ©pare dĂ©jĂ les Ă©vĂ©nements Ă venir. La fuite du roi Ă Varennes en juin 1791 achĂšvera de rompre le lien fragile entre la royautĂ© et le peuple. Mais dĂšs cette premiĂšre pĂ©riode, il est clair que lâordre ancien ne pourra pas survivre. La fin de la monarchie est encore impensable pour beaucoup, mais elle devient chaque jour plus probable.
Pour replacer ces Ă©vĂ©nements dans le long fil de la RĂ©volution, il est utile dâanticiper sur ce qui viendra ensuite : la radicalisation politique, la guerre extĂ©rieure, puis la Terreur. En somme, les annĂ©es 1789-1791 ne sont pas seulement une phase de transition : elles sont dĂ©jĂ le socle de la RĂ©publique Ă venir.
Si tu veux aller plus loin, tu peux explorer les archives officielles de lâAssemblĂ©e nationale ou les collections numĂ©risĂ©es des Archives nationales, qui conservent les dĂ©crets, procĂšs-verbaux et textes fondateurs de cette pĂ©riode charniĂšre.
đ„ Des journĂ©es populaires qui font lâhistoire
La fin de la monarchie ne se joue pas seulement dans les assemblĂ©es et les textes de loi. Elle se construit aussi dans la rue, par lâaction dĂ©cisive du peuple de Paris et des provinces. Entre 1789 et 1792, une succession de « journĂ©es » insurrectionnelles bouleverse lâĂ©quilibre du pouvoir. Chaque mobilisation populaire fragilise un peu plus la royautĂ© et rappelle que, dĂ©sormais, la souverainetĂ© nâest plus confinĂ©e aux salons et aux palais, mais quâelle se manifeste directement dans les faubourgs, sur les places publiques et devant les grilles des Tuileries.
đ„ Octobre 1789 : Paris ramĂšne le roi
La premiĂšre grande victoire populaire contre la monarchie intervient en octobre 1789. Ă Versailles, la disette et le prix du pain attisent la colĂšre. Des milliers de femmes, bientĂŽt suivies dâhommes armĂ©s de piques, marchent sur le chĂąteau pour exiger du roi quâil vienne Ă Paris. La scĂšne est saisissante : Louis XVI, contraint et escortĂ©, quitte Versailles pour sâinstaller au palais des Tuileries. DĂ©sormais, il vit sous la surveillance permanente de la capitale et de ses habitants. Aux yeux de beaucoup, le roi nâest plus un souverain lointain et majestueux, mais un prisonnier Ă demi volontaire, tenu en respect par son peuple.
đââïž Juin 1791 : Varennes et la confiance rompue
Si lâinstallation Ă Paris marque dĂ©jĂ une perte dâautoritĂ©, la fuite Ă Varennes en juin 1791 achĂšve de briser lâimage royale. Le roi et sa famille, dĂ©guisĂ©s, tentent de rejoindre une garnison fidĂšle Ă lâest du royaume. Lâarrestation Ă Varennes, puis le retour humiliant sous escorte, font Ă©clater au grand jour la fracture entre la monarchie et la nation. Pour beaucoup, le roi est dĂ©sormais un traĂźtre, coupable dâavoir voulu abandonner son peuple et comploter avec les puissances Ă©trangĂšres. MĂȘme si lâAssemblĂ©e choisit encore de maintenir la monarchie constitutionnelle, la lĂ©gitimitĂ© royale est dĂ©finitivement entamĂ©e. DĂ©sormais, lâidĂ©e dâune fin de la monarchie nâapparaĂźt plus comme une utopie radicale, mais comme une option envisageable.
𩞠Juillet 1791 : Champ-de-Mars
Un mois plus tard, la fracture sâĂ©largit encore. Le 17 juillet 1791, des milliers de Parisiens se rassemblent au Champ-de-Mars pour signer une pĂ©tition demandant la dĂ©chĂ©ance du roi. La Garde nationale, dirigĂ©e par La Fayette, tire sur la foule : câest un bain de sang. Ce massacre choque et divise profondĂ©ment le mouvement rĂ©volutionnaire. Les modĂ©rĂ©s veulent sauver la monarchie constitutionnelle ; les plus radicaux, au contraire, y voient la preuve que le trĂŽne et la libertĂ© sont incompatibles. Dans ce contexte, des figures comme Robespierre dĂ©fendent le principe de la souverainetĂ© populaire intĂ©grale et refusent tout compromis avec la royautĂ©.
đŁ Lâopinion publique en action
Ces journĂ©es populaires ne sont pas des accidents isolĂ©s : elles rĂ©vĂšlent la montĂ©e en puissance dâune opinion publique active et organisĂ©e. Les journaux rĂ©volutionnaires, les clubs politiques et les sociĂ©tĂ©s populaires relaient les colĂšres et les aspirations du peuple. Les caricatures et les pamphlets tournent en dĂ©rision le roi et la reine, brisant le respect sĂ©culaire qui entourait la monarchie. Ă chaque crise, la confiance sâeffrite davantage, jusquâĂ rendre inĂ©vitable une rupture totale.
Pour plonger dans lâatmosphĂšre de ces journĂ©es, tu peux consulter les journaux et gravures numĂ©risĂ©s sur Gallica (BnF), oĂč les rĂ©cits de tĂ©moins et les images dâĂ©poque montrent lâampleur de la colĂšre populaire et la fragilitĂ© croissante du pouvoir royal.
đïž Une Constitution qui ne suffit pas
AprĂšs les bouleversements de 1789 et les insurrections populaires, lâAssemblĂ©e tente de stabiliser la situation politique. En septembre 1791, la France adopte sa premiĂšre Constitution Ă©crite. Câest une Ă©tape capitale : pour la premiĂšre fois, le roi nâest plus souverain absolu, mais « roi des Français », un monarque constitutionnel dont le pouvoir est limitĂ© et encadrĂ© par la loi. Sur le papier, le compromis semble Ă©quilibrĂ© : la nation est reprĂ©sentĂ©e par lâAssemblĂ©e lĂ©gislative, le roi conserve lâexĂ©cutif et un droit de veto. Pourtant, cette monarchie constitutionnelle va rapidement montrer ses limites. LâĂ©quilibre fragile quâelle propose ne convainc ni les partisans du roi ni les rĂ©volutionnaires radicaux.
âïž Un exĂ©cutif sous suspicion
DĂšs les premiers mois, le fonctionnement de la Constitution est minĂ© par la mĂ©fiance. Le droit de veto royal, censĂ© prĂ©server un Ă©quilibre des pouvoirs, devient un outil de discorde. Chaque fois que Louis XVI lâutilise pour bloquer une loi (notamment contre les prĂȘtres rĂ©fractaires ou la crĂ©ation de camps de gardes nationaux prĂšs de Paris), il est accusĂ© de saboter la RĂ©volution. Aux yeux de lâopinion publique, le roi nâagit pas en dĂ©fenseur de lâordre constitutionnel, mais comme un obstacle au progrĂšs. Son image dâarbitre impartial sâefface au profit de celle dâun conspirateur au service des ennemis de lâintĂ©rieur et de lâĂ©tranger.
Le choix des ministres nâarrange rien. Souvent impopulaires et perçus comme infĂ©odĂ©s au roi, ils ne parviennent pas Ă incarner une autoritĂ© stable. Cette instabilitĂ© renforce lâidĂ©e que lâexĂ©cutif est faible et incapable de protĂ©ger la RĂ©volution. Dans ce climat, les rumeurs de complots royalistes et dâalliances secrĂštes avec les monarchies voisines se multiplient, accentuant la dĂ©fiance du peuple envers la couronne.
đ° Opinion publique et clubs
Au mĂȘme moment, la vie politique sâintensifie dans les clubs et la presse. Les Jacobins, les Cordeliers et dâautres sociĂ©tĂ©s populaires deviennent des lieux oĂč se forgent les grandes orientations politiques. Ces clubs sont des espaces de dĂ©bat, mais aussi de mobilisation : on y rĂ©dige des pĂ©titions, on y prĂ©pare des journĂ©es de protestation, on y façonne lâopinion. Les journaux rĂ©volutionnaires, lus par des milliers de citoyens, dĂ©noncent les ambiguĂŻtĂ©s de la monarchie constitutionnelle et appellent Ă plus de fermetĂ©.
Cette effervescence est le prolongement direct des Ătats gĂ©nĂ©raux de 1789. Les Français ont dĂ©couvert quâils pouvaient peser sur le destin du royaume. Mais alors que lâAssemblĂ©e espĂšre calmer les tensions, la sociĂ©tĂ© civile sâorganise de façon autonome et pousse toujours plus loin ses revendications. La monarchie constitutionnelle apparaĂźt vite comme une Ă©tape inaboutie, incapable de satisfaire Ă la fois les attentes populaires et les exigences des institutions.
đ Une monarchie sans soutien
Ni les royalistes, attachĂ©s Ă lâautoritĂ© absolue du roi, ni les rĂ©volutionnaires radicaux, qui veulent une vĂ©ritable souverainetĂ© populaire, ne se reconnaissent dans cette Constitution. Les premiers la jugent trop contraignante, les seconds trop timorĂ©e. RĂ©sultat : la monarchie constitutionnelle nâa pas de base sociale solide pour la dĂ©fendre. Dans les provinces, les rĂ©sistances sâaccumulent, notamment sur la question religieuse, avec la Constitution civile du clergĂ© qui divise profondĂ©ment les fidĂšles.
En somme, la Constitution de 1791, censĂ©e stabiliser le pays, ouvre en rĂ©alitĂ© une nouvelle phase de tensions. Elle ne parvient pas Ă rĂ©concilier la royautĂ© et la nation. Au contraire, elle confirme aux yeux dâune partie croissante des Français que la monarchie est incompatible avec la RĂ©volution. La fin de la monarchie devient alors une perspective de plus en plus crĂ©dible, mĂȘme si elle reste encore impensable pour beaucoup dâĂ©lites modĂ©rĂ©es.
âïž La guerre qui radicalise tout (printemps-Ă©tĂ© 1792)
Au printemps 1792, un nouvel acteur entre en scĂšne et bouleverse la RĂ©volution : la guerre. Depuis 1789, les monarchies europĂ©ennes observent la situation française avec inquiĂ©tude. LâAutriche et la Prusse redoutent que les idĂ©es rĂ©volutionnaires ne se propagent au-delĂ des frontiĂšres et nâĂ©branlent leur propre pouvoir. De leur cĂŽtĂ©, les rĂ©volutionnaires les plus radicaux considĂšrent la guerre comme un moyen dâunir la nation autour dâun ennemi commun et de dĂ©masquer les traĂźtres Ă lâintĂ©rieur. En avril 1792, lâAssemblĂ©e lĂ©gislative dĂ©clare donc la guerre Ă lâAutriche. Ce choix va transformer radicalement la dynamique politique et accĂ©lĂ©rer la fin de la monarchie.
đȘ Des dĂ©buts catastrophiques
DĂšs les premiĂšres semaines, la France accumule les revers militaires. LâarmĂ©e, dĂ©sorganisĂ©e, manque dâexpĂ©rience et de cadres. Beaucoup dâofficiers nobles ont Ă©migrĂ©, laissant derriĂšre eux des troupes mal commandĂ©es. Les dĂ©faites se multiplient, notamment dans le Nord et lâEst du royaume. Ces Ă©checs alimentent un climat de suspicion Ă Paris : et si les gĂ©nĂ©raux Ă©taient complices de lâennemi ? Et si la cour elle-mĂȘme sabotait lâeffort de guerre pour prĂ©cipiter la chute de la RĂ©volution ? Dans ce climat dâangoisse, chaque rumeur prend des proportions gigantesques, renforçant la mĂ©fiance du peuple envers le roi.
đ Louis XVI accusĂ© de trahison
La position de Louis XVI devient intenable. Aux yeux de nombreux patriotes, il est dĂ©sormais « le roi des aristocrates », soupçonnĂ© de correspondre secrĂštement avec lâennemi. Les veto quâil oppose Ă certaines lois destinĂ©es Ă renforcer la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure apparaissent comme des preuves supplĂ©mentaires de sa duplicitĂ©. La monarchie constitutionnelle, dĂ©jĂ fragilisĂ©e, se dĂ©lite. Dans les sections parisiennes, on exige de plus en plus ouvertement la dĂ©chĂ©ance du roi. La guerre, censĂ©e unir le pays, radicalise au contraire les divisions.
đŁ Le 20 juin 1792 : pression aux Tuileries
Le 20 juin, des milliers de sans-culottes envahissent le palais des Tuileries. Ils forcent le roi Ă coiffer le bonnet rouge, symbole de la libertĂ© rĂ©volutionnaire. Cette humiliation publique illustre le renversement complet de lâĂ©quilibre symbolique : le roi nâest plus respectĂ©, il est surveillĂ©, contestĂ©, ridiculisĂ©. LâĂ©pisode choque les modĂ©rĂ©s, mais galvanise les rĂ©volutionnaires radicaux, convaincus que la monarchie est en train de vaciller.
⥠Radicalisation politique et montée en puissance des sections
Dans les semaines qui suivent, les sections parisiennes sâorganisent de maniĂšre de plus en plus autonome. Elles tiennent des assemblĂ©es permanentes, contrĂŽlent les armes et coordonnent leurs actions. Ce pouvoir populaire parallĂšle met lâAssemblĂ©e lĂ©gislative sous pression constante. Chaque jour, les demandes de dĂ©chĂ©ance du roi se font plus insistantes. Dans les journaux et les clubs, les discours sâenflamment. LâidĂ©e de RĂ©publique, encore marginale en 1789, devient dĂ©sormais une revendication sĂ©rieuse et audible.
En rĂ©alitĂ©, la guerre de 1792 agit comme un rĂ©vĂ©lateur : elle expose les faiblesses de la monarchie, montre son incapacitĂ© Ă incarner lâunitĂ© nationale et alimente la peur de la trahison. Ce climat explique pourquoi, quelques semaines plus tard, le peuple de Paris nâhĂ©sitera pas Ă franchir une nouvelle Ă©tape et Ă renverser dĂ©finitivement la royautĂ©. La fin de la monarchie est dĂ©sormais proche, et chacun en sent la possibilitĂ© imminente.
Pour mieux comprendre cette dynamique, tu peux comparer ce moment avec ce qui suivra aprĂšs : la Terreur, consĂ©quence directe de la radicalisation nĂ©e en 1792. La guerre extĂ©rieure et les divisions intĂ©rieures transforment la RĂ©volution en une lutte Ă mort, oĂč la chute du roi nâest quâun prĂ©lude Ă une pĂ©riode encore plus violente.
đ° 10 aoĂ»t 1792 : la chute de la monarchie
Le 10 aoĂ»t 1792 marque lâun des tournants les plus spectaculaires de la RĂ©volution française : la chute du trĂŽne. AprĂšs des mois de crises, dâĂ©meutes et de suspicion, la monarchie constitutionnelle sâeffondre dans la violence. Ce jour-lĂ , Paris se soulĂšve contre le roi, et lâhistoire de la France bascule vers une nouvelle Ăšre. La fin de la monarchie nâest plus une idĂ©e discutĂ©e dans les clubs ou rĂ©clamĂ©e dans les pĂ©titions : elle devient une rĂ©alitĂ© sanglante, scellĂ©e par les armes et la rue.
âïž Lâassaut contre les Tuileries
DĂšs lâaube, les fĂ©dĂ©rĂ©s venus de province et les sans-culottes parisiens marchent sur le palais des Tuileries, oĂč rĂ©side la famille royale. Les cloches sonnent le tocsin, les tambours battent la gĂ©nĂ©rale. Les insurgĂ©s sont soutenus par les sections parisiennes, qui coordonnent lâassaut. En face, le roi dispose de la garde suisse, des gardes nationaux modĂ©rĂ©s et de quelques fidĂšles. Mais le rapport de force est dĂ©favorable. TrĂšs vite, les combats Ă©clatent. Les insurgĂ©s envahissent le palais, les Suisses rĂ©sistent avec bravoure mais sont submergĂ©s par le nombre. Le massacre est terrible : prĂšs de 600 gardes suisses sont tuĂ©s. Le sang coule dans les cours du palais, symbole de la fin brutale de lâordre monarchique.
đ Le roi suspendu de ses fonctions
Pendant que le palais est pris dâassaut, Louis XVI et sa famille trouvent refuge Ă lâAssemblĂ©e lĂ©gislative. Mais loin de les protĂ©ger, cette dĂ©cision signe la fin de la monarchie. LâAssemblĂ©e, sous la pression des insurgĂ©s et de la Commune insurrectionnelle de Paris, dĂ©cide de suspendre le roi de ses fonctions. Le pouvoir royal nâexiste plus : dĂ©sormais, câest une Convention nationale, Ă©lue au suffrage universel masculin, qui doit prendre en main les destinĂ©es du pays. Câest une rupture radicale : en un seul jour, la lĂ©gitimitĂ© monarchique vieille de plusieurs siĂšcles sâeffondre sous les coups du peuple.
đ La monarchie dĂ©chue
Dans les semaines qui suivent, lâeffondrement se confirme. La royautĂ© nâest plus quâun souvenir. Louis XVI, enfermĂ© avec sa famille au Temple, devient un « simple citoyen », ironiquement surnommĂ© « Louis Capet ». Le 21 septembre 1792, la Convention abolit officiellement la royautĂ© et proclame la RĂ©publique. LâĂ©vĂ©nement du 10 aoĂ»t a donc une portĂ©e immense : il ne sâagit pas seulement dâune insurrection victorieuse, mais bien de la naissance dâun nouveau rĂ©gime, construit sur les ruines de lâancien.
đ Une portĂ©e symbolique et politique
La journĂ©e du 10 aoĂ»t 1792 a une portĂ©e symbolique considĂ©rable. Elle signifie que le peuple peut, par la force, renverser une institution plusieurs fois centenaire. Elle montre aussi que la RĂ©volution est entrĂ©e dans une phase nouvelle, oĂč lâusage de la violence devient un instrument politique lĂ©gitime. Enfin, elle rĂ©vĂšle la radicalisation du processus rĂ©volutionnaire : il ne sâagit plus de rĂ©former la monarchie, mais de la dĂ©truire. La fin de la monarchie nâest pas seulement lâabolition dâune institution : câest la naissance dâun nouvel imaginaire politique, celui de la RĂ©publique.
Pour saisir lâimportance de ce basculement, il faut relier ce moment aux principes proclamĂ©s trois ans plus tĂŽt dans la DĂ©claration des droits. LâidĂ©e que la souverainetĂ© appartient Ă la nation trouve enfin sa traduction concrĂšte : le roi nâest plus rien, et le peuple est tout.
đ HĂ©ritages et nouveaux horizons rĂ©publicains
La chute du trĂŽne le 10 aoĂ»t 1792 et lâabolition officielle de la royautĂ© le 21 septembre marquent plus quâun simple changement institutionnel : elles ouvrent un cycle entiĂšrement nouveau. La fin de la monarchie ne se limite pas Ă la disparition de Louis XVI en tant que souverain. Elle bouleverse lâorganisation politique, sociale et culturelle de la France, et projette la RĂ©volution dans une phase plus radicale. La RĂ©publique nâest pas seulement proclamĂ©e, elle devient dĂ©sormais lâhorizon politique de toute une gĂ©nĂ©ration.
đïž HĂ©ritage institutionnel
La grande nouveautĂ© introduite par la RĂ©publique est le principe de souverainetĂ© populaire. La monarchie constitutionnelle avait tentĂ© une cohabitation entre roi et AssemblĂ©e, mais lâexpĂ©rience avait Ă©chouĂ©. DĂ©sormais, le pouvoir ne repose plus sur une personne sacrĂ©e mais sur la volontĂ© collective. La Convention nationale, Ă©lue au suffrage universel masculin (une avancĂ©e considĂ©rable pour lâĂ©poque), incarne cette nouvelle lĂ©gitimitĂ©. MĂȘme si la RĂ©publique connaĂźtra des dĂ©rives et des divisions, le principe de la reprĂ©sentation nationale et de lâĂ©galitĂ© devant la loi sâancre durablement dans la culture politique française.
đȘ RĂ©formes sociales et Ă©conomiques
La fin de la monarchie entraĂźne aussi des transformations sociales profondes. Les biens du clergĂ© sont nationalisĂ©s et vendus comme « biens nationaux », ce qui bouleverse la propriĂ©tĂ© fonciĂšre. La disparition des privilĂšges, amorcĂ©e en 1789, est consolidĂ©e par la RĂ©publique. Le citoyen devient une catĂ©gorie politique universelle, du moins pour les hommes : tous les Français de sexe masculin, majeurs, peuvent dĂ©sormais voter. Câest une rupture totale avec lâAncien RĂ©gime, oĂč le droit politique dĂ©pendait de la naissance et du rang social.
La sociĂ©tĂ© française se transforme : de nouveaux acteurs Ă©conomiques Ă©mergent, des paysans acquiĂšrent des terres, des bourgeois investissent dans lâindustrie et le commerce. Certes, ces changements ne profitent pas Ă tous, mais ils fixent une nouvelle hiĂ©rarchie sociale, fondĂ©e davantage sur la propriĂ©tĂ© et la citoyennetĂ© que sur la noblesse et les privilĂšges. La fin de la monarchie a donc un impact concret sur la vie quotidienne de millions de Français.
đ§ Une culture politique nouvelle
La RĂ©publique introduit une culture politique inĂ©dite. Les notions de libertĂ©, dâĂ©galitĂ© et de souverainetĂ© nationale deviennent les piliers du discours politique. Les clubs, la presse et les assemblĂ©es populaires continuent dâalimenter cette effervescence. Dans ce nouveau cadre, des figures comme Robespierre acquiĂšrent une influence majeure. Elles incarnent Ă la fois lâespĂ©rance dâun rĂ©gime pur et la radicalisation qui conduira Ă la Terreur. La RĂ©publique naĂźt donc dans la joie, mais aussi dans la tension et la peur.
đ MĂ©moire et hĂ©ritage Ă long terme
La chute de la monarchie en 1792 reste un repĂšre fondamental dans lâhistoire de France. MĂȘme aprĂšs le retour de rĂ©gimes monarchiques au XIXe siĂšcle, lâidĂ©e rĂ©publicaine continue de hanter et de nourrir les dĂ©bats. Chaque retour Ă la monarchie se confronte Ă ce prĂ©cĂ©dent, comme une preuve que le peuple peut, Ă tout moment, renverser le trĂŽne. La RĂ©publique devient une rĂ©fĂ©rence, un idĂ©al vers lequel on revient sans cesse, mĂȘme aprĂšs les Ă©preuves.
Pour mesurer la portĂ©e de cet hĂ©ritage, il suffit de comparer le 14 juillet 1789, la prise de la Bastille, et le 10 aoĂ»t 1792 : deux dates fondatrices, deux ruptures majeures, deux moments oĂč le peuple impose une transformation irrĂ©versible de lâhistoire nationale. Ces repĂšres, toujours commĂ©morĂ©s, montrent que la fin de la monarchie est moins une conclusion quâun commencement.
Pour prolonger ton exploration, tu peux relire la DĂ©claration des droits et suivre son influence sur les dĂ©cisions de la Convention. Les archives de lâAssemblĂ©e nationale permettent Ă©galement de voir comment ces principes ont Ă©tĂ© traduits en institutions concrĂštes.
đ§ Ă retenir : la fin de la monarchie (1789-1792)
En quelques annĂ©es seulement, la France a basculĂ© dâune monarchie sĂ©culaire Ă une RĂ©publique inĂ©dite. Pour bien comprendre ce processus, voici les points essentiels :
- 1789 : la convocation des Ătats gĂ©nĂ©raux ouvre une crise politique que le roi ne contrĂŽle plus. Le Tiers Ătat se proclame AssemblĂ©e nationale et affirme la souverainetĂ© de la nation.
- 14 juillet 1789 : la prise de la Bastille brise le mythe de lâinvincibilitĂ© royale. Louis XVI est contraint de reconnaĂźtre les symboles de la RĂ©volution.
- AoĂ»t 1789 : abolition des privilĂšges et adoption de la DĂ©claration des droits de lâhomme et du citoyen, qui proclame libertĂ© et Ă©galitĂ© comme nouveaux fondements de la sociĂ©tĂ©.
- 1791 : la fuite du roi à Varennes et la fusillade du Champ-de-Mars détruisent la confiance entre la monarchie et le peuple. La Constitution de 1791, instaurant une monarchie constitutionnelle, ne convainc ni les royalistes, ni les révolutionnaires.
- 1792 : la guerre contre lâAutriche et la Prusse radicalise la RĂ©volution. Les dĂ©faites militaires et les soupçons de trahison fragilisent encore davantage la royautĂ©.
- 20 juin 1792 : les sans-culottes envahissent les Tuileries et humilient le roi, symbole de lâeffondrement de son autoritĂ©.
- 10 août 1792 : insurrection parisienne et prise des Tuileries : la monarchie est suspendue, Louis XVI est emprisonné au Temple.
- 21 septembre 1792 : la Convention nationale abolit officiellement la royautĂ© et proclame la RĂ©publique. Câest lâacte fondateur de la fin de la monarchie en France.
- HĂ©ritage : la chute du trĂŽne ouvre un cycle rĂ©publicain qui façonne la culture politique française jusquâĂ aujourdâhui, mĂȘme aprĂšs les retours temporaires de la monarchie au XIXe siĂšcle.
đ La fin de la monarchie nâest pas une simple disparition dâinstitution : elle marque la naissance dâune nouvelle Ăšre politique et sociale, fondĂ©e sur la souverainetĂ© du peuple et lâĂ©galitĂ© devant la loi.
â FAQ : Questions frĂ©quentes sur la fin de la monarchie
Pour tâaider Ă clarifier certains points clĂ©s, voici une sĂ©rie de questions-rĂ©ponses rapides autour de la fin de la monarchie en France :
đ Pourquoi la monarchie est-elle tombĂ©e en 1792 et pas avant ?
La monarchie absolue Ă©tait dĂ©jĂ en crise dĂšs 1789 avec la convocation des Ătats gĂ©nĂ©raux et la prise de la Bastille. Mais beaucoup espĂ©raient encore sauver un compromis sous forme de monarchie constitutionnelle. Câest lâĂ©chec de cette formule, aggravĂ© par la guerre et la fuite du roi Ă Varennes, qui a conduit Ă la rupture dĂ©finitive en 1792.
đ La fuite Ă Varennes a-t-elle vraiment Ă©tĂ© dĂ©cisive ?
Oui. Avant juin 1791, une partie de lâopinion croyait encore que Louis XVI pouvait ĂȘtre lâarbitre de la RĂ©volution. Mais sa tentative dâĂ©vasion a Ă©tĂ© vĂ©cue comme une trahison. DĂšs lors, la confiance entre le roi et le peuple sâest brisĂ©e, rendant inĂ©vitable la fin de la monarchie.
đ Pourquoi les dĂ©faites militaires ont-elles accĂ©lĂ©rĂ© la chute du roi ?
Les revers de 1792 contre lâAutriche et la Prusse ont nourri lâidĂ©e que la cour complotait avec lâennemi. Chaque dĂ©faite Ă©tait interprĂ©tĂ©e comme une preuve de trahison. Dans ce climat de suspicion, la monarchie apparaissait non seulement inutile, mais dangereuse pour la RĂ©volution.
đ Que devient Louis XVI aprĂšs le 10 aoĂ»t 1792 ?
Il est emprisonné avec sa famille dans la prison du Temple. Le 21 septembre 1792, la Convention proclame la République. Quelques mois plus tard, en janvier 1793, Louis XVI est jugé et exécuté. La fin de la monarchie est donc scellée par la mort du roi.
đ Quels sont les grands hĂ©ritages de la chute de la monarchie ?
La proclamation de la RĂ©publique, lâinstauration du suffrage universel masculin et lâancrage durable des principes de la DĂ©claration des droits de 1789. MĂȘme si la RĂ©publique connaĂźtra des crises et des interruptions, lâidĂ©e quâun peuple peut se gouverner lui-mĂȘme sans roi devient une rĂ©fĂ©rence durable en France.
